Origines [Liberty, Black, Sun Star]

Claquement de sabots. Ronflements d'étalons. La poussière s'envolait, pour venir se poser sur la robe des deux combattants en une fine pellicule rouge. Les crinières, soulevées par le vent, s'élevaient au-dessus des encolures courbées comme des crêtes. Les pelages satinés brillaient sous le soleil étincelant, et l'odeur de la sueur était perceptible dans la Combe Sablonneuse. Nouveau coup, esquive souple, éclair d'or. Froufrou noir; Sable Noir rompit le combat et félicita son fils d'une voix chaleureuse:

"Bien joué, Sun! Tu commences à t'aguerrir...nous sommes encore loin d'un vrai combat, naturellement, mais tu t'améliores de jour en jour! Sur un champ de bataille, je préférerais t'avoir à mes côtés que face à moi!"

Sun Star ne put s'empêcher de rouer l'encolure à l'écoute des compliments de son père, puis il fit quelques pas de côté, dansants, et répliqua avec une étincelle de fierté, sa méfiance endormie par les propos élogieux de Sable Noir:

"Merci père...je me suis beaucoup entraîné avec Black, autrefois. Il ne s'agissait que d'escarmouches, mais nous y avons beaucoup gagné tous deux! Bien que Black y prenne bien plus goût que moi...

-Ah, oui...ton frère. Je...Sun Star, es-tu sûr de lui?"

L'étalon s'immobilisa, déconcerté:

"Père?

-Mon fils, nous savons tous que Black est naturellement dominateur...et sa réaction en apprenant qu'il ne serait pas le roi de Wild Horses nous a tous ouvert les yeux sur sa véritable nature...Il n'a que faire de te servir loyalement, Sun Star...il voulait dominer, être le roi! Assoiffé de pouvoir, ambitieux, voilà quel est ton frère! Manipulateur, peut-être, également...vois comme il a su te convaincre du bien-fondé de son départ qui était pourtant -et je pèse mes mots- une trahison!

-Mais...Black est mon frère...Il m'aime comme moi je tiens à lui...

-En es-tu sûr? le ton était insidieux, la question bénigne, mais elle frappa l'étalon doré. Sable Noir poussa son avantage: Donne-moi une seule situation où il a choisi ton intérêt au lieu du sien? Une seule situation où il t'a prouvé, autrement que par des mots, son attachement? Allons, Sun Star...jamais, tu le sais autant que moi. Il est de mon sang et pourtant j'en viens à me demander s'il est réellement mon fils. Comment aurions-nous pu avoir pour rejeton un cheval aussi calculateur, traître, parjure que lui? Il a fui, sans même nous dire où...sans même t'en informer! Belle preuve de confiance, n'est-ce pas?

-Père, peut-être ne savait-il pas où il allait partir...

-En tous cas, jolie preuve d'attachement à nous, non? J'en regretterais même de devoir continuer à veiller sur lui. Oui, cesse donc de prendre cet air interloqué. Black est mon sang et, bien qu'il ne voie en moi que le pouvoir dont il rêve, je ne peux me permettre de le laisser courir les plaines. J'ai demandé à quelques-uns des meilleurs combattants de Wild Horses de partir à sa recherche, accompagnés de leurs compagnons. Ils le trouveront vite, l'entoureront, et alors...alors ils le ramèneront, de gré ou de force. Si il est loyal, il les suivra sans rechigner, ne serais-ce que parce qu'il s'agit de mon ordre. Sinon...eh bien, s'il se défend, les chevaux dépêchés à sa recherche ont ordre de sauver leur peau sans considération pour la sienne.

-Non!"

Sun Star avait crié sans s'en rendre compte, horrifié à l'idée que son frère allait être traqué comme le plus vil des hors-la-loi. Il tenta de plaider la cause de son frère, sans trop d'illusions:

"Père, c'est votre fils...votre sang, et le mien! Mère est-elle de votre avis? Que penserait Liberty? Père...vous ne pouvez tuer votre propre fils!"

Sable Noir lui renvoya un regard dénué d'expression:

"Ni Larme Blanche ni Liberty ne sont au courant. Soit il reviendra, et elles seront ravies, soit il sera tué, et je leur annoncerais qu'il a été éliminé par quelque bête sauvage. Tu es le seul au courant de ce secret car tu es le seul capable de le comprendre et de le supporter. Fais honneur à ton sang, fils. Les traîtres, quels qu'ils soient, doivent être éliminés. Tu comprends cela? Ton frère ne t'aimait pas, tu sais. Il t'a trompé à longueur d'années. Ce n'était pas ta faute et je ne t'en veux pas...mais comment peux-tu persister à le défendre, alors qu'il s'est joué de toi et de ton coeur?"

Sun Star baissa la tête, se rendant presque malgré lui aux paroles de son père. Sable Noir s'approcha de lui, lui donna un coup de museau sur l'épaule puis se retourna et, s'éloignant, lança par-dessus son épaule:

"Ton coeur et ton sang sont ceux d'un fils de CannonBall. Tâche de t'en montrer digne, mon fils...tu mérites ton trône. Je sais que ta loyauté ne quittera jamais ta famille, comme il se doit. Ton frère, lui, a choisi la sienne, n'est ce pas? Abstient-toi de faire le même choix que lui. Reste avec ta famille, laisse les traîtres subir leur châtiment."

Il partit, laissant, seul dans la clairière, un étalon solitaire, tête basse, ne sachant que penser, terrifié à l'idée de son frère faisant seul face à des tueurs...et d'autant plus effrayé, qu'il devait reconnaître que les paroles de son père l'avaient ébranlé, et qu'au fond de lui, il était prêt à accepter leur véracité.

Arome de banane ?
On l'a fait en chimie , ça sent même pas la banane ce truc , pff XD

La nuit étendait doucement son ombre sur le monde endormi, et les étoiles s’allumaient, une à une, au firmament bleuté. La plaine s’alanguissait doucement, les paupières se faisaient lourdes, les prédateurs partaient en chasse, tandis que, sous la lune encore jeune, une silhouette solitaire marchait, ses sabots se posant sur le sol encore tiède des rayons du soleil dans un léger nuage de poussière, vite dispersé par le vent nocturne. Sa robe noire luisait sous les étoiles, comme un miroir d’ombre, et ses crins flottaient sur son encolure, guère longs : Black n’avait jamais eu la crinière opulente de son frère ou de son père. Sur ce point-là comme sur les autres, il était différent. Définitivement différent.
Pas un jour ne s’écoulait sans qu’il pensât à son frère doré, son jumeau de cœur sinon de robe, pas un jour sans qu’il ne sentait le goût doux-amer de la solitude. Alors il ralentissait son pas, levait ses yeux noirs vers les cieux infinis, et songeait confusément que l’étalon palomino cheminait sous le même ciel, et que ceci, au moins, malgré la distance, les rassemblait. Sa douleur n’en était guère apaisée, mais généralement, l’amertume se faisait moins forte, et le sentiment de liberté reprenait le dessus.
Il avait maigri, les pâtures n’étant pas aussi riches que celles auxquelles il était habitué, à Wild Horses. Il se sentait fatigué, car, la sécurité étant absente dans ce monde de combats et de prédation, il ne dormait plus que d’un œil. Sa robe, ternie par la poussière, n’avait plus l’éclat de la propreté, mais gardait cependant celui de la bonne santé.
Black ralentit son allure pour lever la tête, aux aguets. Cela faisait près d’une semaine qu’il parcourait sans relâche les plaines de ce monde si nouveau pour lui, si différent de celui où il était né, sans rencontrer âme qui vive. Aucun animal parlant ne se trouvait ici, seulement des prédateurs aussi idiots qu’agressifs. Pour l’heure, il les fuyait, la rage au cœur, mais se promettait qu’il viendrait un jour où il ne tournerait les talons devant aucun être, fut-il le plus puissant du monde. Et alors, les fauves seraient ses alliés, ou de futurs cadavres.
L’étalon de deux avait entendu un bruit léger, ténu, presque imperceptible pour ses jeunes oreilles. Il s’arrêta et, arquant le col, tourna la tête, à droite, à gauche, dans l’espoir d’apercevoir celui à qui appartenait cet effluve. Car Black était presque sûr qu’il s’agissait d’un cheval. Les prédateurs ne sentent pas l’herbe, et les autres herbivores n’ont pas cette « signature » caractéristique, qui est la marque de l’espèce en général.
Son inspection rapide ne donna rien et, déçu, le cheval noir reprit sa marche.
Alors que la lune avait déjà atteint le milieu du ciel étoilé, il entendit un murmure doux et cristallin, qu’il reconnut instantanément : le bruit d’une rivière. L’étalon noir prit le trot, attiré par cette eau ruisselante, et l’éventuelle perspective d’un bain.
Il déboucha devant un petit cours d’eau, dont il évalua rapidement la profondeur, finissant par se décider pour la hauteur de ses épaules, et la force du courant, qui était idéale : pas trop rapide, mais suffisamment puissante pour que l’eau ne soit pas trouble et boueuse, mais claire et translucide. Black posa un sabot dans la rivière, savourant sa fraîcheur vivifiante, puis d’y laissa glisser dans une gerbe d’éclaboussures. Le courant était assez puissant, mais le cheval noir y fit face et plongea son museau dans l’eau, pour aspirer à longs traits le liquide vital, avant de souffler par les naseaux, pour le simple plaisir, que connaissent tous les enfants, de faire des bulles. Puis il plongea la tête jusqu’aux oreilles dans la rivière frémissante, laissa un instant l’eau caresser sa robe de satin noir, avant de redressa l’encolure en ronflant des naseaux dans un nuage de gouttelettes, puis de se cabrer, abattant ses sabots dans l’eau, éclaboussant jusqu’aux étoiles tandis que sa robe ruisselante se débarrassait de la poussière des jours de marches, sous la course immatérielle de l’eau fraîche.
Il gambada longuement dans l’eau, comme un poulain, puis se hissa sur la berge, de l’autre côté du cours d’eau, prit machinalement quelques brins d’herbe brûlée avant de reprendre sa route, au grand trot, revigoré par son bain de minuit.
Un matin, il croisa par hasard la route d’un troupeau de chevaux. A sa vue, les juments émirent des couinements inquiets et ramenèrent leurs poulains près d’elles, tandis que les jeunes mâles gonflaient l’encolure et frappaient du sabot. Il était vrai que Black avait une allure somme toute guère avenante, maigre et efflanqué, une lueur sombre dans des yeux de nuit, sa robe rutilant sous le soleil, mais sans parvenir à faire oublier la noirceur qui émanait déjà de lui. Tout ce vacarme finit par attirer l’étalon chef, qui ronfla et se cabra devant l’intrus. Sans un mot, mais le message avait été clair : Black n’était pas le bienvenu et se devait de fuir. L’étalon noir répliqua par un cri strident, sans signification particulière, mais qui était indéniablement un hennissement de défi. L’étalon, un bel animal alezan dont les cicatrices trahissaient les combats, ne s’embarrassa pas d’intimidations et bondit d’emblée sur le fils de Sable Noir, qui ne dut son salut qu’à un mouvement d’écart brutal. Furieux, Black se dressa sur ses postérieurs, et fut très surpris que l’alezan se cabre à son tour, pour lui décocher un coup de ses antérieurs, qui le blessa plus moralement que physiquement. Black poussa un cri de rage et fondit sur son adversaire, qui n’eut aucun mal à éviter la charge de l’animal maladroit et inexpérimenté.
Un feulement de fauve retentit non loin, et les deux étalons tournèrent la tête. Il s’agissait d’un puma, qui s’enfuit en ondulant de l’échine, estimant sans doutes que quelques chevaux ne valaient pas la peine de s’immiscer dans un combat d’étalons.
Black revint au combat une seconde avant l’alezan. Cette seconde fit toute la différence, puisque la charge violente et absolument pas contrôlée –il aurait été bien incapable de se stopper- renversa le cheval alezan, qui heurta le sol et se débattit dans l’espoir de se relever. Black lui fit face, il ne savait pas ce qu’il devait faire mais son instinct le lui soufflait. Lentement, presque au ralenti, le cheval noir leva son sabot couvert de terre. Il l’abattit.
Étincelle dans les yeux de l’alezan. Choc, qui se répercuta jusque dans son épaule noire. Écœurant craquement d’os. Souffle, soupir plutôt, qui s’enfuit.
Black observa son ennemi, le crâne broyé par le coup terrible, cesser doucement de vivre. Le sang et la cervelle mêlées teintaient son sabot noir d’un rouge rosé. Dégoûté, l’étalon recula et frappa le sol plusieurs fois. Son rival mort, il n’avait aucune raison de rester là. Il lança un regard alentours, au cas où quelqu’un aurait également envie de remettre en cause sa victoire, puis arqua le col et s’en fut dans un galop rapide qui arracha des mottes de terre au sol ensanglanté et labouré.
Plus loin, il ralentit et ferma les yeux, une seconde. La terrible prise de conscience venait de s’immiscer en lui, insidieuse, sucrée, jouissive et terrifiante, haïssable et tendre.
Il avait tué. Pour la première fois, il avait pris la vie d’un autre, et il resta quelques secondes pantois, incapable de l’accepter. Puis il reprit le dessus et rangea l’événement dans un coin de sa mémoire, avant de reprendre sa course.
Disparues, honte et regrets.
Seule restait la fierté.

Rencontre Black - Stelmy j'imagine : DD

La suite , espèce de limace è_é

Me , I'm during the holiday :B
En fait j'ai relu toute l'histoire à partir de zéro quand ma charmante connection net coupais toutes les deux minutes pendant dix ... bref , ça m'a sauvé d'un ennui profond xD