Les Atolls (Liberty)

Tranquille journée de printemps, soleil et une légère brise ébouriffant les crins, Liberty était heureuse. C'était donc d'un trot guilleret que la vieille matriarche arpentait ses terres, quand soudain l'envie lui prit de rejoindre le bord de mer, pour profiter de la sérénité des eaux, maintenant que la période des tempêtes hivernale était passée et bien révolue. L'ancienne reine du Clan des Etoiles se mit donc en route, et c'est après un trajet de quelques heures - car elle n'avait plus sa fraîcheur d'antan, qui lui permettait d'avaler les kilomètres au galop - qu'elle toucha du pied la douce chaleur du sable doré au soleil.

Une chaleur inattendue en cette saison régnait sur les plages blanches des atolls, et Liberty cligna des yeux dans la luminosité soudaine tandis qu'elle émergeait de la forêt servant de frontière à la plage, éblouie par le sable blanc. L'air, chauffé au contact du sol, s'élevait vers les couches supérieures du ciel et la dépression ainsi formé appelait une agréable et fraîche brise de mer, qui fouetta la crinière de la vieille jument et en emmêla les mèches blanches. Liberty sourit et s'ébroua dans le souffle du vent.

Ses yeux pétillaient de plaisir comme ceux d'une jeune pouliche, et ses crins dansaient follement dans la brise taquine tandis qu'elle s'élançait, au petit trot, sur la plage d'un blanc parfait. Malgré ses années, qui frisaient la quinzaine désormais, la jument blanche au profil arabisé avait conservé la beauté de sa jeunesse, à peine teintée d'une maturité nouvelle et de ce léger affinement des muscles, ce creusement des naseaux qui fait dire d'une jument que la fleur de son âge est passée. Liberty demeurait belle et attirante, en pleine santé, sa robe luisant blanc sur blanc et ses sabots clairs battant le sable avec ardeur, la queue empanachée rabattue sur le dos par sa bonne humeur, mais son déclin approchait doucement et viendraient les jours où elle s'amaigrirait, où ses dents usées ne sauraient plus se battre, où elle vieillirait, enfin.

En attendant cet inévitable jour, c'était l'heure du jeu et Liberty s'offrit un petit galop guilleret au long de la plage avant de descendre, au trot, dérapant légèrement dans les masses de sable, vers la mer qui battait paresseusement un estran blanc de neige à peine parsemé d'algues. Tandis qu'elle rejoignait l'eau transparente pour y tremper ses jambes fines et toutes en muscles et tendons, la jument aperçut du coin de l'oeil un autre cheval, de robe claire lui aussi, qui s'essayait à quelques brasses au loin. Immergée jusqu'à mi-poitrail, ruisselante d'eau et de bonheur, Liberty lança un hennissement d'appel vibrant et amical.

C'était un jument, blanche de la tête aux sabots. Hurricane lui répondit d'un hennissement joyeux, et commença a revenir vers la plage.

L'inconnu avait un corps fin. Sa tête, ses membres... si bien que l'apaloosa se sentait épaisse comme un cheval de trait, à côté d'elle.

La plus jeune trottait dans l'eau, levant haut les antérieurs et battant des postérieur. Elle s'eclaboussait le dos et l'encolure.

Puis, l'eau lui arriva au genoux, au paturon, jusqu'à ce qu'elle soit sur le sable sec. Elle s'oubroua, avant de continuer vers l'inconnue, maintenant à quelques mètres d'elle. La queue en panache, la tête haute, elle commença un petit galop en direction de la blanche. En quelques foulées, elle y était, et tournait maintenant autour d'elle une ou deux avant de s'arrêter brusquement devant elle.


[Désolée, j'ai eu un petit problème avec internet, mais ça va mieux maintenant]