Not Afraid [PV-Liberty]

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♠Not Afraid

Le ciel était voilé, les nuages semblaient naviguer dans un azur ombrageux, de grands cumulus menaçants se chargeaient d'électricité. Bientôt, une pluis glacée s'abattit des cieux, transperçant jusqu'aux os un petit animal de couleur sombre. On pouvait voir au loin des éclairs frapper le sol, ils abordaient des couleurs violacées. La frêle créature exécuta se qui était pour lui une cabrade: il était à la fois terrifié par la foudre mais aussi attiré par ces formes étranges. Ses fines oreilles ne cessaient de pivoter, le poulain marchait sur une falaise déchirée, au fur et à mesure qu'il progressait, la roche s'imbibait d'eau ce qui rendait l'endroit glissant et par conséquent dangereux. Il n'avait pas plus de trois mois, voyageait seul, et ne connaissait pas l'endroit, il ne pouvait donc se mettre à l'abrit. Sa crinière touffue qui normalement se tenait serrée et compacte avait comme fondue sur son encolure. Il chuta alors, s'écorchant légèrement au niveau du genoux, il se releva, manquant de retomber au sol. Il poussa un hennissement sonore, et fixa les éclairs qui s'abattaient sur la terre. Mainte fois on lui avait répété de ne pas s'inquiéter, que ce n'était rien. Mais aujourd'hui, il était seul; aussi courageux qu'il voulait l'être, il était emprunt à la peur. Murano décida d'accélérer l'allure, pour enfin trouver refuge sous toit rocheux qui se tenait suspendu dans le flanc de la falaise, il se laissa tomber, repliant ses membres sous son corps pour avoir plus chaud. Il posa sa tête sur ses genoux, pui ferma les yeux.

L'odeur de l'orage courait sur Wild Horses, une senteur d'ozone que tous connaissaient. Il y avait de l'électricité dans l'air, chevaux et bêtes étaient nerveux. Tous s'agitaient, excepté quelques uns qui, aimant l'orage, le déchaînement de puissance des éléments, la beauté des éclairs zébrant le bleu pourpre du ciel, attendaient avec impatience que le tonnerre gronde. D'autres enfin n'en avaient cure. Shiki était de ceux-là. Le poulain trottait avec vigueur sur les rocs durs du fond du Défilé, tête haute et naseaux grands ouverts. Il s'arrêta soudain, observant les nuages.
Le vent se levait, agitant sa petite crinière de poulain qui, secouée par la bourrasques, dansait sur son encolure courte et fine. Sa queue, qui s'allongeait aussi, flottait dans l'air. Il avait une robe très particulière, que le soleil encore présent faisait luire: un pelage d'un gris fumée, qui s'assombrissait sur les naseaux, le pourtour des yeux, les oreilles et les jambes pour devenir anthracite, comme sur la ligne du dos, pommelé d'argent sur les épaules et la croupe. Ses yeux étaient gris eux aussi, pâles, perçants comme ceux de son père, Aglow Star, tandis que ses crins noir corbeau, luisants, semblaient descendre en ligne droite de sa grand-mère, Stelmaria. Fils d'Odyssée et Aglow Star, deux grands combattants, Shiki était beau, mais il ne le savait pas encore. En revanche, les adultes qui l'observaient pressentaient que, plus tard, mature, il serait un véritable Don Juan, aussi élégant et séduisant que son géniteur. Pour l'heure cependant, le poulain émerveillait davantage par la vivacité de son esprit que par son étrange prestance.

Il avait laissé sa mère derrière. Elle avait accepté de le laisser vagabonder seul, mais Shiki savait bien que, au-dessus de lui, volait probablement Ska, le surveillant de son regard efficace. Il s'en fichait.
Une pluie glacée tomba sur lui comme un rideau, le trempant de la tête aux pieds. Shiki frissonna tandis que les bourrasques, qui se faisaient plus fortes, le giflaient et lui rabattaient l'eau en pleine figure. Comme tout poulain, inquiet et trempé, il décida d'aller rejoindre sa mère. Il prit le trot, rendu nerveux par la pluie. Il était un cheval, pas un hippocampe!! Le vacarme de l'eau tombant du ciel, sa densité, le vent qui soufflait dans ses oreilles et le faisait cligner des yeux le rendaient sourd et aveugle, incapable de percevoir une odeur, et il détestait ça. Soudain, un bruit sur sa droite, le son d'une glissade, alerta Shiki. le poulain, cependant, choisit de continuer à revenir vers sa mère, inquiet. Le Défilé avait un rocheux, et l'eau n'y était pas absorbée...étant donné la quantité qui tombait...
Shiki essaya encore de progresser un peu puis se rendit à l'évidence: le vent soufflait de plus en plus fort, il voyait à peine où il allait, trébuchait sur les roches glissantes. Mieux valait s'abriter en attendant que passe l'orage. Alors le petit se glissa sous un surplomb qui le protégerait de la pluie. Et se rendit compte qu'il avait été devancé.

Pitoyable avec sa robe trempée et sa crinière plaquée sur son encolure -encore que lui n'était sûrement guère mieux-, et surtout frêle, presque maigrelet, un poulain noir se tenait couché dans le fond de l'anfractuosité. Shiki s'approcha de lui et déduisit qu'ils avaient le même âge, deux à trois lunes. Il s'ébroua, se secoua puis demanda:

"Euh, salut. Tu t'appelles comment?"

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Alors que le poulain fermait les yeux et commençait à sombrer dans les brumes du sommeil, il entendit une voix, d'abord lointaine qui se manifesta au milieu de la brume par un puissant rayon, les nuages immaculés se dissipèrent, comme dissouts par l'éclat de la lumière.
Murano ouvrit les yeux, clignant doucement des paupières. Il se releva, le sang de sa blessure superficielle avait séché. Il considéra le poulain à la robe souris l'espace d'un court instant, s'ébroua, et répondit sur un ton chaleureux à son protagoniste:
"Bonjour, moi c'est Murano! Et toi?"
Il était ravi de rencontrer enfin quelqu'un, un poulain surtout. Il arqua légèrement son encolure, ce qui lui donnait du charme, mais il ne savait pas tout ça, c'était comme un jeu pour lui, comme une seconde nature.
Les deux animaux se tenaient dans un renfoncement sec, la pluie tombait en rideau tout autour, glacée. Le poulain noir s'approcha de ce tissu d'eau et regarda au dehors, la foudre continuait de zébrer le ciel. Maintenant qu'il était à l'abri, ce phénomène le captivait.

La pluie redoubla dehors, mais Shiki ne broncha pas. Le poulain ne connaissait pas bien le coin mais ici, il était en sécurité au moins jusqu'à ce que le temps se calme, après il faudrait sortir et rejoindre maman en trottant sur des pierres trempées mais, euh...chaque chose en son temps! Le poulain semblait heureux de voir un congénère et lui adressa la parole avec plaisir. Il s'appelait Murano. Lorsque le jeune se leva, Shiki remarqua du sang sur sa jambe, son genou, mais cela ne semblait pas bien grave et d'ailleurs, le sang ne coulait plus, alors il n'y fit aucune allusion. Lorsque le poulain noir lui demanda de décliner son identité, Shiki le fit et même plus:

"Je suis Shiki, j'ai trois ou quatre mois, ma maman s'appelle Odyssée, mon papa Aglow Star, ce sont tous deux des solitaires. Grand-mère, c'est Stelmaria, grand-père c'est Equinox, et tous les deux ce sont de grands combattants célèbres. Comme Black. Black c'est mon grand-oncle en vrai, mais maman dit qu'il est comme son père, alors, il est un peu mon grand-père. Et ma vraie grand-mère maternelle c'est Liberty, mais maman ne s'entend plus avec elle et je ne la vois jamais. Quand à mon grand-père paternel c'est Sword mais il est mort au combat. Oh, et j'ai des cousins aussi, Jun et Moondance, qui descendent à la fois de Balbas, le frère de Stelmaria, et de Hell Demon, le fils de Black. Des doubles cousins quoi!!"

Ouh là, quel discours. Mais Shiki était comme ça. Il avait découvert récemment toute la notoriété et la valeur de ses ascendants, et comme tout poulain il était vachement fier. D'autant plus qu'il savait être le premier à réunir, dans son sang, la lignée des Thars du Clan de Glace et celle des chefs des Clans de Wild Horses. A la fois fils d'Hymlya et de CannonBall, en somme.
Le poulain s'ébroua et adressa un sourire contrit à Murano:

"...pardon. Maman dit toujours que je parle trop. Tu viens d'où? Tu es solitaire?"

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Murano souria, il aimait beaucoup faire des rencontres. Il écouta attentivement le poulain qui se tenait face à lui, un dénommé Shiki. Il n'en avait aucun doute, ce poulain était exeptionnel. Heureux comme un poulain qui en rencontre un autre, il fit un petit mouvement alerte sur le côté, avant de revenir plus posément dans sa position initiale. Il s'éclaircit un peu la voix en toussotant avant de répondre calmement:
"Je trouve ça bien sympathique de rencontrer des gens qui parlent beaucoup! Je ne sais pas vraiment d'ou je viens, j'ai suivi un tigre blanc, il m'a mené jusqu'ici et oui, je suis solitaire, je préfère vivre libre..."
Il souriait de façon radieuse, amicale et chaleureuse.

Un poulain. Un copain potentiel. Et un cheval de son âge, dans ce monde d'adultes. Quoi d'étonnant à ce que le petit Shiki soit si content de voir Murano? Et quand Shiki était heureux, Shiki parlait et parlait et parlait encore...petit poulain impétueux, vif et intelligent. Murano, quant à lui, commença à évoquer un tigre blanc et le jeune gris sourit:

"L'animal-lié de mon grand-père ou presque Black est un tigre blanc. Il s'appelle Snow...il a l'air méchant parce qu'il est très grand et que bon, il a des crocs pas pour rire, mais en fait il est adorable et moi je l'aime beaucoup! Des fois tu sais, il joue avec moi. On fait la course ou on joue à la bagarre mais...c'est lui qui gagne! Ou bien il me laisse gagner, mais je le devine, alors..."

Shiki tourna ses yeux acier vers le rideau de pluie frémissante qui barrait l'entrée:

"Dis donc, ce qu'il tombe! Si on restait là en attendant que ça se calme?"

Puis reprit:

"Moi aussi, je suis solitaire. Maman et papa aussi, et je préfère ça. Tu sais, je crois que j'aimerais pas devoir obéir à un chef!"

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Murano venait d'arriver et se sentait bien en la présence de ce jeune poulain. Il aimait beaucoup la compagnie, il adorait voir du monde. Il était attentif aux paroles du poulain.
"Tu as beaucoup de chance! Cela doit être bien de connaître un animal tel qu'un tigre blanc, surtout, tu as beaucoup de chance de pouvoir jouer avec lui!"
Et comme n'importe quel poulain, dans sa tête, les images d'un jeun endiablé avec un tigre passèrent dans sa tête. Puissance et vélocité. Un rêve.
Il regarda le rideau de pluie, mais ne dit rien, il répondit cependant:
"Je te comprends, je préfères vivre libre, seul maître de mes envies..."

Shiki approuva doucement. Les jeux avec Snow étaient formidables, car le tigre savait gambader autour de lui, frapper à patte molle et, en douceur, inculquer au jeune un réel goût pour le combat. Le poulain s'ébroua avec un sourire:

"Tu sais quoi? Un jour si tu veux, je te le présenterai. Snow est génial. Les gens qui disent que Black n'aime pas les poulains sont des idiots, des vrais. Black, il aime bien les jeunes. Et Snow, c'est un bon copain de jeux. Il n'est pas du tout agressif, ou hargneux comme certains voudraient me le faire croire...je m'en fiche, je les laisse dire ce qu'ils veulent, si ils voulaient être amis de Black ils n'avaient qu'à être moins hypocrites et stupides."

Le poulain gris s'ébroua:

"Oh oui, je partage ton opinion. Je ne pourrais pas supporter qu'on me donne des ordres. Même mes parents, il faut d'abord qu'ils m'expliquent, même si je leur fais confiance. Et puis, je préfère être mon seul maître."

Soudain, la pluie redoubla encore et le vent se mit à souffler; C'était un véritable tempête qui faisait rage.
Un grondement retentit. L'eau, coincée dans le sol rocheux du Défilé, formait un torrent qui le dévalait avec force. Déjà, les flots pénétraient la petite caverne.