Night Dreams (PV - Tara)

Ce souffle chaud... Ce rythme de pas cadencé... Cette lune argentée... Tout cela me rappelle tant de choses... Tant de choses si belles, si agréables... Ces bons moments que je n'oublierais jamais, j'en suis certain. Je m'arrête, ferme les yeux et sourit. Je respire ce bon air frais, cette brise si douce, qui faisaient danser nos crins... Oh, maintenant, ce que j'adorais la nuit! J'adorais galoper sous le bel astre argenté qu'était la lune, me sentir libre, imaginer son nom tracé dans les étoiles, ce nom qui était à jamais gravé dans mon cœur. Je lève la tête, respirant de nouveau l'air frais qui effleurait mes membres fins et qui redessinait ma musculature dans la nuit. Il ne me manquait rien, aujourd'hui, ou presque. Mais seule ma pensée suffisait à remplir sa présence. Je repart au galop de plus belle, fouettant l'air de mes sabots d'argent, la queue en panache, les naseaux dilatés, me régalant de sentir le vent chaud danser avec mes crins. Je descends la pente à toute allure, rendant mes foulées plus rapide et plus puissantes possibles. Puis je m'arrête soudainement, à la vue d'une silhouette féminine qui se dresse devant moi. Je m'en approche gentiment et lui sourit :

-Bonjours, je suis Cirius, du Soleil et vous?

La nuit était douce. Douce par sa température qui n'étais ni trop chaude, ni trop fraîche, en cette calme fin d'été. Douce par cette couleur veloutée qu'arborait le ciel sans nuage, piqueté de petites étoiles en lesquelles on pouvait lire bien des choses. douce par cette silhouette claire qui s'y aventurait, à foulées lentes et élastiques, dans un galop parfait, enrobée par la lune d'un halo argenté.

Tara laissait derrière elle les terres où elle avait vécu son adolescence, et tentait pour la première fois une escapade dans les territoires de Clan. Elle ignorait si elle en avait réellement le droit. Oh, elle y avait songé. Serait-elle tuée ? Elle ne connaissait pas ces chevaux qui vivaient en hardes. Elle ne les avait jamais rencontrés... Seraient-ils accueillants ou belliqueux ? Sympathiques ou agressifs ? Elle s'attendat à tout, son caractère protecteur la laissant aimer chaque cheval pour ce qu'il était.

Une odeur parvint à ses naseaux délicats, et elle ralentit, repassant à un trot rapide. Un autre cheval avançait vers elle. Descendant la pente à puissantes foulées, le cheval ne sembla l'apercevoir qu'une fois qu'il arriva en bas, à quelques longueurs d'elle. Il ralentit et s'adressa sans plus de cérémonie à la petite jument pie-palomino. Un sourire s'était dessiné sur les lèvres sombres de l'étalon.

Légèrement surprise par cet élan de gentillesse, Tara secoua sa crinière crème et répondit :

"Enchantée. Mon nom est Tara... Je suis solitaire."

Elle laissa elle aussi un léger sourire apparaître sur son visage.

Cirius leva la tête, ferma les yeux et... Sourit. Il sourit et sourit encore. Il sourit en pensant à elle. Elle, cette belle âme blanche qui le parcourait nuit et jour de tout son être, elle, cette ombre royale qui chevauchait entre la lune et le soleil, tantôt claire tantôt sombre, tantôt bien tantôt mal... Il respira l'air frais de la nuit puis regarda la jument droit dans les yeux. Une belle jument blanche parsemée de tâches d'un brun clair. Ses crins blancs et soyeux ondulaient au vent, ce vent doux qui dessinait le formes de son corps musclé et de ses jambe fines et droites. Elle le regardait de ses yeux doux surplombés de cils blancs et fins. Cirius effectua une belle révérence devant elle, d'un mouvement habile et gracieux, puis sortit d'une voix douce et joyeuse :

-Eh bien, enchanté mademoiselle! Belle nuit, vous ne trouvez pas?

Il regarda ce ciel bleu parsemé de fines étoiles brillantes puis pris un petit galop, un large sourire dessiné sur son visage, pour tourner doucement autour de la jument, la détaillant de ses yeux noisettes.

Tara recula d'un pas, surprise et - elle devait se l'avouer - légèrement... gênée de la conduite de l'étalon. Les oreilles frémissantes, elle tenta de ne pas le quitter des yeux, faisant onduler sa queue d'ivoire sans prononcer un mot, attendant qu'il ne s'arrête. Elle se décida à répondre à sa question, de peur de paraître impolie.

"La nuit laisse les ténèbres exprimer leur lumière..." Souffla-t-elle en baissant légèrement le museau.

Cette phrase souleva une vague d'émotion dans son âme. Elle n'avait que de flous souvenirs de son enfance et de ses parents. Mais elle savait qu'une nuit, son père avait laissé chéapper ses mots. Cet étalon, qui lui avait paru si froid, avait laissé filtrer une infime partie de ce qui pouvait être une âme de poète, une âme aimante. Celle d'un véritable père. Elle secoua la tête. non. Son père était Courage, désormais. L'étalon silver l'avait élevée, éduquée, formée aux maux de la vie. Elle lui devait tant.

Elle reprit pied dans la réalité, et reposa ses grands yeux bruns sur Cirius.

"Marchons ensemble ?" proposa -t-elle

Elle ne lui laissait pas l'occasion de répondre au se lança dans un trot souple et cadencé, invitant d'un mouvement de la tête le cheval brun à la suivre.

Cirius fronça les sourcils. Cette jument avait un caractère assez étrange, il pouvait sentir cette vague de tristesse dans les mots qu'elle venait de prononcer. Un léger frisson le parcourra. Il eu subitement envie de lui communiquer sa joie, la voir galoper joyeusement sous la lune blanche et brillante.
Gêné, il baissa les oreilles, tourna la tête vers la pénombre, inquiet. Où était Lucky, en ce moment? Il espéra qu'elle ne se trouvait pas toute seule, dans cette nuit sombres aux quelques étoiles brillantes. Une très belle nuit tout de même. Il regretta soudainement de l'avoir laissé toute seule. Mieux vaut seule que mal accompagné... Cette réplique le fit sourire intérieurement. Elle saurait sûrement se défendre, elle, shikaku sanguinaire. Et puis, il y avait Silver, ce loup gris et froid. Un nouveau frisson le parcourra lorsqu'il pensa à lui, dont la jalousie infernale le rongeait de l'intérieur. Replongeant ses yeux noisettes dans ceux de la jument devant lui, il lui dit d'un air tiraillé entre la joie et l'inquiétude.

- Cette nuit là est douce, joyeuse. C'est comme si cette lune lumineuse veillait sur nous, nous protégeant du mal...

Il avait prononcé ces derniers mots avec un sourire calme, lointain. Oui, il aimait cette nuit. C'était comme si... comme si c'était là où tout avait commencé.

Les paroles de l'étalon laissait elles-aussi transparapitre une certaine... mélancolie. Ce n'était pas de la tristesse, juste une légère tension, une inquiétude passagère qu'il masquait derrière de bien belles paroles. Et Tara appréciait ces mots bercés de poésie. Ils lui rappelaient sa famille sans qu'elle ne sache exactement pourquoi à chaque fois. En cet instant, sous le ciel noir et les lueurs blâmes des astres nocturnes, elle se sentait en paix. Les souvenirs refulaient, aparaissant quelquefois comme des visions éthérées d'un passé désormais révolu.

Peut-être étaient-ce aussi des souveirs qui tiraillaient l'esprit de son interlocuteur. Alors qu'ils marchaient de concert, à pas mesurés, elle s'ébroua et répondit finalement dans un murmure :

" Mais de quel Mal nous protéger... ?"

Ce n'était pas exactement une question qui lui était destinée, mais elle ne pouvait s'empêcher de la formuler, aussi bas que ce fut. Une interrogation unique dans son âme de colombe. Quel était ce mal dont il parlait ? Le temps était à la paix, bien qu'elle soit parfois bien fragile, et le seul mal que les équidés combattaient étaient leurs propres chimères. Le passé qui les hantait, des souvenirs toujours plus puissants ; la crainte d'un avenir, du sien, de celui d'autres. La famille, les amis, les ennemis et les haïs.

Quel était son mal, à elle ? C'était bien là une question qu'elle ne s'était jamais posée. Alors qu'elle avançait en compagnie de cet équidé qui lui était encore bien inconnu, elle se mit à y songer, dans le silence de ses mèches claires. Oui, quelle était sa chimère ? Elle savait que dans toutes les âmes e terrait un dragon, un cerbère endormi qui grondait en sourdine. Sa vie n'était pas faite que de notes claires et de gouttes cristallines.

Elle redressa les légèrement les oreilles, demeurant attentive à la réponse de Cirius.

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