Radioactive. | PV.

Radioactive 

©BH&UD

Elle regarda autour d'elle. Ils étaient immobiles a présent, tous deux, ils n'avaient rien a faire ensemble. Mais Siana n'avait pas envie de le quitter tout de suite. Elle se sentait bien avec lui.

- Je suis sûre que vous saurez faire renaître de ses cendres le Clan du Crépuscule. Que vous serez un bon chef pour lui.

Elle fixa ses beaux yeux. Il finirait bien vite par partir, il n'allait pas rester indéfiniment immobile avec elle. La petite noire souhaitait le faire rester le plus longtemps possible, mais la seule manière d'y arriver serai certainement d'engager une nouvelle conversation. Pourquoi voulait elle qu'il reste ? Elle l'appréciait, oui, elle l'appréciait beaucoup, et ce n'était pas parce que c'était un chef.

- Être chef d'un Clan ne doit pas être une tâche facile...

Elle baissa les yeux, secoua sa tête pour écarter son long toupet qui lui entravait la vue et guetta la réponse de Zanzibar.

❧ Radioactive.

Une faible brise souffla un instant sur eux, alors que Zanzibar avait redressé l'encolure, tournant sa tête vers le ciel, alors que ses naseaux s'étaient dilatés, et qu'ils aspiraient à grands traits l'air qui était ici exempt de toute trace de souffre. Que ces terres étaient belles. Quelles lui étaient précieuses et chères ! Jamais il ne se lasserait de ces paysages, de ces endroits sauvages et vierges d'hommes. C'était ici qu'il était né, c'était ici qu'il vivait, et c'était ici qu'il voulait mourir, que son corps, un jour, se mélange à cette terre qui pour lui était bénite. Mais avant ce jour, il lui restait un long chemin à parcourir, et il comptait bien remplir son rôle.

Les cendres du Crépuscule, oui ... que restait-il aujourd'hui à ce clan, sinon la volonté d'un chef encore trop jeune peut-être ? Les guerriers semblaient n'y être que de passage, alors qu'ils s'évanouissaient dans la nature, disparaissant au détour des chemins. Le Crépuscule mourait encore. Il mourait alors qu'il ne demandait qu'à renaître ! Où étaient les juments suivies de leurs jeunes poulains ? Où étaient les guerriers plein de feu et de sang prêts à tout pour défendre les leurs et l'honneur de leur clan ? Il lui semblait parfois qu'il était seul, alors que l'ombre massive de son père se promenait parfois sur ses terres, anciennement siennes.

❝ C'est parfois dur, je ne mentirai pas. Mais je dirige pas non plus une armée, et pour l'heure, mon seul problème, de taille certes, est que je ne trouve pas de guerriers. Mais n'est-ce pas un problème moins embêtant que de se rendre compte que sur ses terres, il n'y a plus assez de nourriture pour tous ses membres ? ❞

Son regard s'était perdu sur la terre des flammes, alors qu'il semblait ailleurs, comme si son cœur et son esprit, à cet instant, allaient autre part. Autre part où, un jour, il lui avait été plus bon de vivre. Autre part où, un jour, quelqu'un était parvenu à apaiser les démons de son cœur. Oh, qu'il était seul le bel animal !

❝ Mais je dois vous embêter avec tout ça ! Voudriez-vous marcher un peu, que nous puissions parler d'autres choses ? Je ne sais rien ou presque de vous, de vos opinions ni de vos idées. Dites-moi quels sont vos rêves, dites-moi ce que vous ne voudriez pas dire ... ! ❞

Le jeune étalon était curieux, et il n'avait pas peur de le montrer, alors que son regard s'était embrasé. Il voulait tout savoir sur elle, qu'elle lui raconte d'autres pays, d'autres territoires, qu'elle lui dise ce qui la faisait rire comme ce qui lui faisait peur ... il voulait la connaître.

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L'étalon alezan lui proposa de marcher un peu. Ravie de cette idée, elle hocha la tête en signe d'approbation et se mit en marche, attentive aux propos de celui qu'elle espérait être son nouvel ami.
Il était très curieux sur elle, c'était évident, et il ne cherchait visiblement pas à le cacher. Mais cela ne dérangeait pas Siana de parler d'elle, si ils devenaient effectivement amis.

- Je pourrai vous parler longuement de moi, dit-elle en souriant. Je n'ai pas de rêve particulier, si ce n'est...

Elle hésita un instant, mais reprit :

- ... combler cet immense vide en moi. Cette... douloureuse solitude.

Elle posa son regard sur le sien. Puis elle décida de passer a autre chose.

- A part ça... je n'ai pas tellement grand chose a dire de moi. Je n'ai pas de vrais amis, juste des connaissances avec lesquelles j'ai sympathisé, mais elles sont rares, et je déteste les hommes. Je les déteste. Parce que...

Elle baissa les yeux.

- Je les hais.

Elle se ressaisit et reprit :

- Vous êtes vous déjà aventuré hors des Terres de Wild Horses ?

❧ Radioactive.

L'étalon de flammes répondit au signe de tête de Siana par un sourire, alors qu'il rompait déjà l'allure, callant ses foulées sur celles de la Solitaire. Il n'avait jamais eu peur de dire ce qui était, lui qui avait pendant si longtemps souffert des mensonges des autres. Il aimait les mots sincères, qu'ils soient cruels ou tendres, il aimait pouvoir avoir confiance, sans jamais douter. Mais pouvait-il encore s'offrir ce luxe, maintenant qu'il était chef de clan ? Les acrobaties diplomatiques le transformeraient obligatoirement, à la longue. Bientôt, lui aussi serait obligé de mentir, pour le bien des siens. Mais cette heure, jusque-là, n'était pas arrivée, et chaque soir il se prenait à prier qu'elle n'arrive jamais.

Zanzibar l'écoutait avec une attention non feinte, alors que ses oreilles lisaient dans la voix de l'Arabo-mustang de la tristesse encore, et du mépris envers les hommes. Elle avait été seule sans doute trop longtemps, et peut-être même avait-elle eu affaire à des hommes. L'étalon de feu aurait pu lui poser bien d'autres questions sur l'origine profonde de cette rage, mais il n'en fit rien : il savait que parfois, il valait mieux attendre que l'autre se livre plutôt que de l'y contraindre. Alors il ne l'interrompit pas, prenant la parole une fois seulement qu'elle avait terminé.

❝ Ce rêve là sera rapidement réalisé, Siana, vous pouvez me croire ! Quand je parlais d'un rêve ... enfin ! C'est un joli souhait que celui que vous venez d'évoquer. ❞

Il se tut, alors qu'il la regardait avec insistance. Il était à deux doigts de lui proposer de l'aider à réaliser ce rêve, mais il avait l'impression qu'ils ne se connaissaient pas encore assez. Le guerrier du Crépuscule voulait en apprendre davantage sur elle, mais il n'excluait pas qu'une fois la journée terminée, s'ils erraient encore ensemble, alors sans doute deviendraient-ils amis.

❝ Une fois, oui. Mais j'étais encore si jeune et naïf à l'époque ! Depuis, je n'ai plus eu le loisir de m'enfuir à nouveau. Et puis vous savez, quand le Désert Blanc se pare d'un manteau rouge, quand le Crépuscule embrasse toutes ces terres ... Je me demande pourquoi rêver d'ailleurs encore. Mais vous, qu'en pensez-vous ? ❞

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Elle écoutait l'étalon de feu tout en observant le paysage, beau et mystérieux. Elle voulait continuer d'avancer, le découvrir, le connaître. Peut être avec Zanzibar ?
Il était vrai que ce paysage était magnifique. Elle se demanda soudain comment étaient les Terres du Crépuscule. Peut être étaient elles semblables a celles-ci ? Ou peut être étaient-elles encore plus belles et mystérieuses ?
Elle n'était pas sûre de pouvoir encore répondre sincèrement a l'étalon.

 - Un jour, pourrez-vous m'emmener sur vos terres ? demanda t-elle, les yeux brillants. Je veux les découvrir, les connaître... avec vous.

Elle venait d'admettre qu'elle appréciait beaucoup la compagnie de Zanzibar. Elle continua de le fixer dans les yeux. Elle espérait que lui aussi, voulait mieux la connaître, pour lier... une amitié.

- Je ne puis répondre a votre question sincèrement, dit-elle enfin. Je ne connais pas les Terres du Crépuscule, mais... je veux les connaître.

Elle était sincère. Elle voulait les connaitre.

❧ Radioactive.

Les paroles de Siana firent naître un sincère sourire sur son visage, alors qu'un doux rire s'émanait de sa gorge vibrante. Il était ravi de voir l'intérêt que ses terres suscitaient chez la jument noire, alors qu'ils s'éloignaient toujours davantage de la terre des flammes. Le ciel, au-dessus d'eux, devenait de plus en plus clair, alors que l'âcre odeur du souffre semblait n'être plus qu'un mauvais souvenir.

Avec lui. L'étalon de flammes aurait pu se jouer de ces paroles, mais il n'en fit rien. Zanzibar, de ses jeunes années, avait vite compris comment reconnaître les équidés avec lesquels il pouvait jouer, et ceux qu'il ne fallait ni brusquer, ni provoquer, même doucement. Siana avait vécu seule pendant longtemps, et il devait être un des premiers avec lequel elle reparlait franchement.

❝ Vous me verriez honoré d'être accompagné d'une si jolie jument que vous ! Et comme j'y pense ... les terres du Crépuscule ne sont pas si loin d'ici. Peut-être voudriez-vous que nous y fassions un tour ? Si nous nous mettons en route maintenant, nous y arriverons sans doute en même temps que le Crépuscule du Soir. ❞

Cette idée le fit sourire. Rien n'était plus beau que les terres du Crépuscule inondées par le soleil déclinant. Siana tomberait forcément sous le charme de ces terres ! Calme, il soutenait son regard sans ciller, alors qu'il lui souriait encore.

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BH&UD

Son visage s'illumina d'un grand sourire. Elle avait tellement envie de découvrir ses terres ! Elle s'exclama, toute contente :

- Ce sera avec le plus grand plaisir !

Elle appréciait beaucoup Zanzibar, et l'idée qu'il l'emmène avec elle, lui faire découvrir son monde la ravissait. Elle qui avait toujours vécu seule, à l'écart des autres, semblait s'être trouvé un ami...
Elle piaffait déjà, énergique, voulant absolument voir le Crépuscule du Soir dont avait parlé l'alezan.

❧ Radioactive.

La peau de son garrot eut un vif frémissement, alors que Siana venait d'accepter de l'accompagner sur ses terres. Ainsi, ce soir, il aurait quelqu'un à ses côtés pour admirer le ciel en feu. Il ne serait pas l'unique âme à hanter les terres de son pays. Dans ses pas passeraient ceux de la Solitaire. Son âme, serait-elle aussi chamboulée que pouvait l'être la sienne quand il se retrouvait devant semblable spectacle ? Frissonnerait-elle de ces chaudes couleurs, de ces clairs obscurs embrasant le ciel ?Oh, qu'il avait hâte de voir sa robe luire sous ces chatoyantes lumières !

❝ Alors, si vous le voulez bien, suivez-moi, dame ! ❞

Et déjà, il s'élançait, la tête haute et les yeux brillants. Il semblait l'inviter à le suivre, qu'elle entre dans son monde et danse sur ses terres ... Quelque chose, entre eux, naissait.