Time Is Running Out [PV- Odyssée&Shiki]

Time Is Running Out
○Black Hole&Odyssée&Shiki
Time passes
And I'm bored
Time passes
And I seek you
Time passes
And I hate you
Time passes
And I swear I'll get you

Je marche depuis tellement de temps, je ne compte plus les nuits, et comme bien souvent, je vois la Lune se lever et se coucher. Je vois aussi, avec la plus grande amertume, le soleil prendre la place de cette chère Lune. Je hais le jour, le ciel bleu, les oiseaux qui chantent. Je hais la joie, je te hais... Dans ma bouche comme dans la leur, le mot "haïr" prend un autre sens, c'est pour celà que je me permets de l'utiliser si souvent.
Je vis alors ce dessiner des pierres, elles tranchaient l'azur céleste, elles paraissaient pâles face à l'océan sombre qui habritait les étoiles. Une image passa alors dans ma tête: ces pierres étaient comme des lames de fer, froides et cruelles.
La nuit, Black Hole était dans son élément. Mais son imposante masse noire prenait d'autres allures; allure démoniaque, morbide et lugubre.
Il avançait, grande silhouette maigre, au milieu de ces pierres, jetant de temps en temps des regards à la Lune. Il aimait particulièrement cet astre.
Il marchait donc, capturant le paysage nocturne de ses yeux, autour de lui, le silence se faisait, rien n'osait bruisser. Et toutes les choses de la nuit prenaient vie: ces ombres énigmatiques qui se déplacent quand on les approche, ces spectres qui se dressent au lointain...
Pour Black Hole, pendant la nuit, tout prenait un sens...

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La nuit s'étendait, telle un voile noire, sur les terres endormies de Wild Horses. Chevaux et herbivores s'assoupissaient tandis que s'agitaient les animaux nocturnes. Les Ombres quittaient leur perchoir rocheux pour, à grands battements d'ailes silencieux, survoler les étendues sèches du Clan du Crépuscule, loin, au-dessus des nuages, si haut que même leur présence n'était perceptible que lorsque, par hasard, le vol des dragons masquait la lune. La vigilante gardienne de la nuit dispensait cette nuit là une douce clarté par son demi-cercle, bienveillante et rassurante. Dans un froufrou de velours, les oiseaux de nuit partaient en chasse, les prédateurs sortaient de leurs caches, loups, fauves. Là-bas, loin là-bas sur les territoires de Glace, les Léopards des neiges géants s'étiraient, bâillaient et partaient patrouiller aux limites de leur territoire tandis que les chatons, saoulés de jeux, sommeillaient. Tous les êtres se reposaient sous la garde des étoiles.
Sauf quelques uns, et parmi eux ce poulain qui trottait sur le sol terreux dans lequel étaient plantés les Pierres Levées. Ronflant sans nervosité, Shiki s'arrêta et observa les alentours, nouveaux pour lui, car sa mère ne le laissait aller de nuit que depuis peu, au vu des dangers accrus dans l'ombre. Près de lui, une pierre dressée ressemblaient à une étrange silhouette, ni animale ni végétale, comme un animal mythologique surplombant de sa masse le jeune cheval. Shiki secoua sa crinière noire en repartant au trot.
Âgé désormais de six mois, le poulain, sevré, se développait bien. Il avait perdu l'air rondouillard des jeunes chevaux, et désormais grandissait, osseux et dégingandé car sa musculature ne croissait pas en conséquence, à cet âge. Ses jambes encore un peu longues, son dos et son encolure courts, sa tête fine aux grands yeux trahissaient son statut d'enfant. Immobile entre deux rochers, il ne broncha pas lorsque la lune, voilée par un nuage, se dégagea et inonda de sa clarté les alentours, révélant sa teinte.
Gris fumée sur tout le corps, Shiki présentait de légères pommelures au tour sombre sur les épaules, les flancs et la croupe, tandis que ses extrémités, jambes, tête, masque autour des yeux prenaient des teintes sombres d'anthracite. Ses oreilles, son bout de nez, le bas de ses jambes, ses crins mi-longs étaient noir corbeau, noir de nuit aux reflets bleus. Dans ce physique particulier et déjà élégant, les yeux gris acier, pâles, du jeune cheval tranchaient comme un trait de lumière. Shiki avait pris de sa mère la grâce, de son père la force et la charpente, et nul doute qu'il ressemblerait à son grand-père Equinox, à Black: un grand cheval solide mais élégant.
En attendant, c'est un autre animal dont il détecta la présence, et aussitôt fronça le nez. C'était un grand cheval, apparemment noir, dont les muscles et la robe luisaient sous la lune. Lorsque le cheval tourna la tête, Shiki, dans l'ombre d'une pierre, vit un cercle blanc sur son visage d'ombre. Immobile mais sachant bien que, le vent dans le dos, il avait dû être repéré, le jeune étalon sortit de sa cachette et s'avança vers son aîné au grand trot, levant haut les genoux sans s'en apercevoir, imitant la démarche élégante de son père, ce séducteur.
Comme il avait vu Black ou d'autres le faire, il tenta de se dresser sur ses postérieurs pour saluer l'inconnu, mais sa musculature encore faible ne lui permit d'effectuer qu'un geste rapide et un brin maladroit, alors, retombé sur ses pieds, il inclina la tête et l'encolure en une jolie révérence pour saluer cet aîné avec le respect qu'on devait aux adultes:

"Bonsoir."

Ce cheval avait une odeur étrange. Une odeur que Shiki n'avait jamais senti de sa vie. Intrigué, l'étalon ramené une oreille en arrière et souffla:

"Vous portez l'odeur d'une tribu mais je ne sais pas laquelle. De quel Clan êtes-vous?"

36 arrondies à 30 lignes = +2 points XP ajoutés

Le vent frais du soir apporta aux naseaux de l'entier noir une odeur équine. En un mouvement las mais élégant, il fit un demi-tour, ses crins de velours enveloppant la base de son encolure. Ses grands yeux noirs étaient habités par une flamme étrange, pérpetuellement balayée par un souffle dont seul Black Hole connaissait l'origine.
Il ne lui fallut pas longtemps avant de voir l'équidé s'approcher, et dès ses premiers pas, le Shikaku put reconnaître sous ses traits un jeune étalon qui, nul ne pouvait en douter, deviendrait d'une grande beauté, d'un charme rare mais certain.
Mais ce jeune animal de 6 mois ne fit naître que mépris et dégoût chez l'entier. Cette allure, ces courbes... Et devant le salut maladroit du poulain, Black Hole ne pût réprimer le mouvement arrière de ses oreilles.
Par courtoisie ou par un jeu dont seul lui connaissait les règles, il éleva sa masse royale dans la pénombre nocturne, dominant l'animal de toute sa hauteur. Il se laissa retomber lourdement au sol, engeandrant un imperceptible tremblement.
D'une voix suave mais prédatrice, il laissa échapper:
"Bonsoir..."
Mais sa voix fût rapidement balayée, se perdant en un doux murmure cristallin qui partit loin, bien loin de ce duo nocturne.
Du corps de cet animal, une odeur autre s'émanait, mélange musqué. L'entier sombre en avait conscience, il était un cas à part, séparé des Clans ou de la solitude, il appartenait au mal. Dans sa tête résonna alors ce mot; mot qu'il chérissait et qu'il aimait, mot qui le dénonçait: Shikaku...
Allait-il se jouer du jeune âge de l'animal?
"Une odeur dis-tu? Si ce n'est celle de la Mort qui m'imprègne..."
Rien qu'en évocant ce nom d'une douce cruauté, un frisson s'empara de lui... Il aimait la Mort d'une telle force, mais il se renonçait toujours à la rejoindre, il ne voulait pas s'éteindre de façon si lamentable. Il voulait qu'elle vienne à lui, et qu'ils pactisent, si ce n'était déjà fait...
"Ce doit être celle des Shikaku."
Il redressa la tête, dominant l'animal de sa hauteur. Au milieu de son front, un délicat cercle immaculé trônait, sur son épaule, une longue cicatrice, et sinon, du noir, partout sur lui, du noir. Mais ce que ce jeune animal ignorait, c'était qu'au plus profond de Black Hole, il n'y avait que du noir...

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Shiki rabattit en arrière ses fines oreilles lorsque l'étalon, suite à la maladroite révérence du poulain. Le petit fixa l'inconnu avec un regard inquiet, se demandant ce qu'il avait bien pu encore rater...après tout, les adultes ne s'énervaient pas pour rien, n'est ce pas? Alors...pourquoi cet étalon semblait-il contrarié? Shiki recula d'un pas lorsque le grand mâle se dressa à son tour sur ses postérieurs, si beau, si puissant, si grand que le poulain en fut tout émerveillé. Quelle grâce, quelle force dans ses muscles! Ébloui par la splendeur du grand mâle, Shiki recula néanmoins lorsqu'il se laissa retomber avec force, faisant frémir le sol et voler la poussière sous ses pieds, ses crins dressés comme une crête sur son encolure.
Le poulain frissonna sous le joug du regard sombre de l'étalon. Comme par un pressentiment, il sentait, face au grand mâle, une aura étrange, menace et séduction à la fois. Un peu comme celle de Black, mais pourtant différente, elle instillait en Shiki une sorte de crainte que son grand-père par adoption ne lui inspirait pas, pas plus que sa grand-mère Stelmaria. La Jument Rouge était pourtant une des pires tueuses des terres de Wild Horses...mais Shiki ne la craignait pas, car il la connaissait bien.
Cet étalon en revanche...oui, il le craignait. C'était la première fois de sa vie que Shiki avait peur d'un adulte et il plaqua ses oreilles sur son crâne, méfiant. Où était maman, jamais là quand il avait besoin d'elle! A, ça lui apprendrait à aller se balader la nuit! Même la voix suave de l'inconnu fit frissonner le jeune cheval...
Et plus encore lorsqu'il apprit que l'inconnu était un...Shikaku. l'entendre parler de la Mort avec une telle délectation inquiéta le jeune animal qui leva des yeux agrandis par la peur vers le cheval noir. Finalement, il retrouva l'usage de sa voix:

"Vous...êtes un Shikaku?"

Le jeune cheval recula encore. Il tenait à conserver une distance de sécurité face à cet étalon si crispant. Puis il pointa les oreilles en avant, sa curiosité de bébé reprenant le dessus:

"Comment vous appelez vous? Vous êtes le premier Shikaku que je rencontre...quelle est leur différence avec les chevaux des Clans ou les solitaires?"

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Les yeux de Black Hole ne se détachaient de la silhouette du poulain, retraçant les traits de cette dernière dans sa tête, dans son esprit fou. Il avait vu ce jeune étalon, et jamais il ne l'oublierait. Son visage était gravé à vie dans sa mémoire.
L'aura prédatrice du grand mâle noire devait être opressante et déstabilisante pour le poulain, et rien qu'à cette pensée, un contentement s'empara de l'esprit dément de Black Hole. Et quand il vit son interlocuteur reculer, il avança, d'un mouvement prédateur et féroce, il effectua deux foulées, brisant la ligne de "sécurité", violant le retrait volontaire.
Mais lui, n'avait-il jamais eu peur? Il ne s'en souvenait pas, mais face à son état, la certitude qu'il ne craignait rien, sinon de ressentir la joie un jour, perçait avec une force médisante.
Quand l'animal gris repris la parole, un éclair alluma les yeux de Black Hole. Shikaku. Il ne s'empêchait d'aimer ce mot, pour sa force, pour ce qu'il représentait.
Il reprit sa voix suave, ce murmure cristallin, mais une intonation plus passionée se fit percevoir:
"Je crois, oui..."
L'ironie du premier instant n'était pas trop remarquable, ironie basique et peu enviable.
Comment s'appelait-il? Il le savait, mais à la question qu'il s'était posé de savoir qui l'avait nommé ainsi, il lui était impossible de répondre avec précision. Bien sûr, c'étaient eux. L'animal Empereur, ou eux, les autres? Ou bien, ce qui serait encore plus flatteur -du moins pour lui- c'était peut-être la Mort qui s'étaot mêlée du coup du sort et avait décidé de lui donner ce nom étrange, mais à la sonorité puissante et quelque part apocalyptique.
"Black Hole. Trou Noir."
Il détourna la tête, posant son regard sur les Pierres Levées. Etranges et énigmatiques, une atmosphère tendue s'échappait du lieu. Il reposa son regard sur l'animal aux différentes teintes de gris avant de poursuivre:
"Un Shikaku n'a pas de lois, de frontières, de limites. Un Shikaku n'a personne pour lui dicter ce qu'il doit faire. Un Shikaku est seul... Mais n'oublies jamais: un Shikaku est fou!"
Un frisson d'excitation parcourut le dos mi-long mais solide de l'entier. Oui, comme les Shikaku, il était fou, mais il avait toujours connu cet état de démence, il s'y était habitué, il l'aimait.
"Et toi, qui es-tu?"

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Et voilà qu'il s'approchait! Shiki ne comprenait pas cette peur qui le saisissait au coeur, non, aux tripes, en voyant ce grand cheval noir et massif. D'où lui venait cette angoisse quasi-atavique? Black Hole n'avait pas l'air plus féroce que Black, n'était pas plus grand que lui, avait le même genre de voix suave, doucereuse, terriblement enjôleuse et la même attitude de dandy, teintée d'élégance et de séduction...alors? Pourquoi cet étalon noir à la pelote blanche, comme une tache de lumière dans un univers d'ombre, l'inquiétait-il tant?
Lorsque le cheval reprit la parole en fixant le poulain, ce dernier se sentit mal à l'aise face au regard trouble du cheval. Non pas qu'il ait l'oeil féroce des animaux sauvages ou celui, terriblement froid, d'un Ombre, mais l'étalon avait dans ses prunelles sombres une étrange flamme qui dansait...une flamme vacillante et brûlante à la fois, une flamme que Shiki était certain d'avoir déjà vu quelque part, mais où?
Une flamme de...quel était le mot? Il ne le trouvait plus, perdait ses moyens et son bagout, face à l'étonnant animal à la robe d'ombre et au regard trouble. Le cheval reprit la parole en donnant son nom, Black Hole, trou noir, ces trous noirs qui aspiraient tout sur leur passage et ne le rendaient jamais, matière condamnée jusqu'à la fin des temps, mystères de la science et de l'astronomie. Shiki, quelquefois, observant le ciel, pensait à ces trous voraces dont avaient parlé les anciens, eux si sages, et qui, selon leurs dires, avalaient les étoiles. La lumière...pouvait-elle être vaincue?
Black Hole parlait encore, des Shikaku. En parlait bien...Shiki riva sur le cheval des yeux agrandis par la curiosité, et songea en son for intérieur que ce qu'était un Shikaku ressemblait fort à ce qu'était un solitaire...la folie mise à part. Le poulain frémit à la suite de la remarque. Folie. Oui, c'était ce qui transparaissait sous l'allure du cheval noir, ce qui lui remuait les tripes depuis quelques minutes. La folie...imprudence ou impudence, le caractère enjoué et vif du poulain reprit le dessus:

"La folie mise à part, vous n'êtes donc pas si différents de nous autres solitaires. La solitude, la liberté, l'absence de frontières et de maîtres, nous les avons aussi...mais nous ne sommes pas fous, du moins pas tous.
Cela dit...vous dites vous-même que les Shikaku et donc, vous même êtes fous. Mais est ce qu'on peut encore dire que c'est de la folie...puisque vous en êtes conscient? Après la folie, ça veut dire aussi qu'on n'est pas conscient de son état, non? Dans ce cas, votre folie serait une façon d'être, mais pas une folie au sens de maladie où on l'entendrait d'ordinaire?"

Sa crainte éclipsée un instant par son esprit, Shiki fronça le nez, réfléchi. Puis réalisa qu'il était peut-être allé trop, bien trop loin, et frémit soudain. Mais sa voix, lorsqu'il répondit à la question du cheval noir, ne trembla pas:

"Je suis Shiki, un solitaire."

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L'entier noir se tenait immobile, comme enraciné dans le sol souple recouvert d'herbe fraîche. Aucun de ses muscles ne bougeaient, il était au repos, dans une surprenante tranquilité que seule l'ardeur de son regard pouvait trahir. Mais atteint de démence, ses 'réveils' étaient innatendus et brusques. Rien qu'un mot, une sensation, un geste, une parole et il changeait. Il reprenait cette agressivité, cette haine maladive repartait à l'assaut de son esprit. Mais face à ce poulain, il se montrait, quoiqu'il ai adopté une position fauve et farouche, tranquille et... Calme?!
Il venait d'avouer son nom, et il était maintenant focalisé sur ce dernier. Oui, pourquoi Black Hole? Peut-être parce que son côté positif, son âme et son coeur avaient été aspirés par... Un trou noir? Ou n'avaient-ils jamais existés? Ou pire encore -mieux pour lui- n'était-ce pas lui qui avait enseveli ses sentiments sous des tonnes de cendres et de souvenirs sanglants?
"Un Shikaku est seul. Sous tous les points de vues. Mais nous conservons un point commun essentiel..."
Pouvait-il lui dire ce qu'il pensait être? Il n'aurait qu'à voir le résultat...
"Nous sommes animés par un désire de mal, de vengeance, de haine. Nous voulons voir la peur, la souffrance, la Mort sur le visage des autres..."
Black Hole était en train de s'énerver, ses muscles se contractaient avant de se relâcher pour renouveler l'effort. Il en disait trop pour rester dans un état sain, il ne pouvait plus demeurer dans cet état pasif, inactif... Il était plus qu'escagassé par cette innactivité désoeuvrante.
N'était-il pas fou? Il ne jugea pas util de répondre, il le savait, il en était convaincu. Et même s'il se trouvait dans la confession des choses, rien ne pouvait l'empêcher de ne plus rien contrôler, de ne plus rien ressentir et de se battre tel un diable contre un autre qui n'aurait aucune chance.
Une fois le désir de faire du mal installé, il était irrépréssible.
"Bien..."
Sa voix restait la même, mais ses yeux changeaient, la flamme devenait de plus en plus grande, elle semblait prête à dévorer le peu qu'il restait de son propriétaire, mais surtout, elle miroitait la Mort...

23 lignes = +1 point XP ajouté

Ce cheval se tenait si immobile que Shiki en était presque impressionné. Presque car, coutumier des discussions avec Black ou ses grands-parents, il avait déjà vu des chevaux si maîtres de leur corps et de leurs nerfs qu'ils ne bronchaient pas d'un poil...D'ailleurs, quand ses grand parents combattaient, Shiki les observait avec des yeux éblouis. Ils étaient si beaux, si élégants dans cette chorégraphie mortelle où chaque pas en entraînait un autre, cette danse d'esquives et de coups, où nul ne retenait ses pieds et ses dents, sachant bien que l'autre éviterait...L'amitié qui liait Black et Stelmaria, la complicité des deux avec Equinox donnait au combat une dimension supérieure. Les chevaux ne jouaient plus simplement, mais le jeu se sublimait, le combat devenait danse où chaque faux pas entraînait des blessures dont ils n'avaient cure, et le lien qu'on devinait au sein du trio rendait l'affrontement à la fois beau et émouvant. La première fois, Shiki avait été étonné de les voir se battre mais, à observer les jeux explosifs de ses parents, où les sabots volaient plus souvent qu'à leur tour, il avait compris que c'était là quelque chose de nécessaire à la cohésion de leur lien. Le combat les rapprochait et prenait des allures de rite où l'on dépensait toute son énergie en surplus, pour le pur plaisir de la dépense physique et le simple amour de la bataille. Non pas l'amour du sang ou de la mort, non, du combat, pour sa beauté et sa force.
Shiki pointa les oreilles vers Black Hole qui lui expliquait le point commun des Shikaku...ça, ce n'était pas beau. Pas beau comme l'amour du combat pour sa splendeur, non...Eux ils voulaient la mort, la haine et la souffrance, le chaos, la peur, la douleur...Le poulain demanda, avec l'innocence candide de son jeune âge:

"Mais pourquoi voulez-vous tout cela? De quoi vous vengez-vous? Qu'est ce qui peut bien être assez terrible, pour justifier une vengeance pareille et surtout, aussi longue, éternelle?"

Et puis il plaqua ses oreilles en arrière. Recula. Dans les yeux de l'étalon, la raison s'estompait, remplacée par la Folie, celle qui pousse les êtres à quêter le sang, celle qui motive la souffrance de l'autre, celle qui donne soif du liquide rouge et vital qui s'écoule lentement des plaies béantes. La Folie de la mort et de la douleur...Shiki, soudain, avait peur. Peur pour lui. Il était trop jeune pour mourir! Mais où était donc Maman? De tout coeur, le petit espéra qu'elle arriverait à temps. Même en courant il ne pouvait pas espérer échapper au grand cheval noir.
Il prit le risque de parler encore.

"Mais, vous dites que vous êtes seul...seul, sans amis ni amour? Ni poulains ni parents? Pas de liens quels qu'ils soient, ennemis, amis, ou même souvenirs? Réellement seul? Comment est-ce possible? Ce doit être là une situation étrange à vivre...je ne peux même pas me l'imaginer."

28 lignes = +1 point XP ajouté

Le sang de Black Hole était en train de bouillir; il lui frappait les tempes à un rythme effréné, et, le vide se fesait peu à peu dans la tête du Shikaku. Le vide? Pas tout à fait, en lui naissait, où plutôt, re-naissait cet état si particulier jusqu'à ce stade de la discussion 'maîtrisé'; mais on ne maîtrise pas la Folie. Qu'est-ce qui lui avait empêché de toucher au poulain jusque là? Peut-être était-ce le vice de l'animal sombre, parler d'abord, agir ensuite. Mais son état d'innactivité l'envoyait sur des ondes obscures, démoniaques... Ce n'était plus qu'une question de temps... Il suffirait d'une parole, d'un geste malencontreux, et Black Hole frapperait... Pourquoi perdre son temps à expliquer à un être qui se refusait à ces théories ce qu'était un Shikaku?
Black Hole n'était pas venu ici pour voir du pays non, il était là pour jouer; où pour quelqu'un de normal: il était venu pour la trouver, pour lui dire qu'elle avait perdu; et -ce serait la fin duspectacle, du 'jeu'- pour la tuer. Mais pourquoi voulait-il la tuer? Non, ce n'était pas une vengeance, il voulait juste lui montrer qu'elle n'était rien, et qu'en refusant de le voir aimer le Mort, elle s'était tuée. Oui, il lui ferait payer cet afront par le prix de sa vie.
"Nous avons tous des motifs différents; pour ma part, je venge une vieille amie, et, d'une certaine façon, je joue..."
Oui, il possédait ce sadisme horrible, il possédait cet amusement macabre de voir la Mort se peindre sur le visage de ceux qu'il désignait comme 'victimes'.
Qu'est-ce qui le ratachait à la raison maintenant? Rien, plus rien. Celà fesait depuis trop longtemps qu'il n'avait pas joué, qu'il n'avait pas ressentit les sensations qui accompagnent un 'combat' où, dans le cas du poulain, il s'agissait plutôt d'une 'mise à mort'; non parce que Black Hole le croyait incapable de se battre, mais face au développement musculaire de ce derneir par rapport à un poulain de 6 mois... Le hasard ne pouvait être de la partie.
Un sourire passa alors sur les lèvres de l'entier, sourire affreusement satisfait d'une idée qui lui traversait l'esprit. Oui, empiler les cadavres sur son chemin lui plaisait... Ce bel être gris, doux, pensif, rêveur, tellement beau et aimant, si jeune et joyeux, cet animal qui se promettait de devenir un étalon hors du commun, allait-il s'éteindre ce soir?
Et encore une fois, sa voix suave mais tellement opressente par sa conotation prédatrice frappa:
"Sans ami, l'amitié n'est qu'une illusion, les amis nous trahissent forcément; ni amour, l'amour est un mensonge qui, au fil du temps, s'amenuise et finit par disparaître. Ni poulains, pour qu'ils perdent les valeurs que je me serai tuer à leur enseigner? Ni parents, ne les ai-je jamais vraiment connu? Des ennemis? Non, où du moins, après notre rencontre, ils ont quitté ce monde. Seul car même mes souvenirs me fuient..."

Et alors qu'il venait tout juste d'achever ses phrases, il se cabra, encore une fois. Mais cette fois-ci, un rayon de Lune illumina son visage qui s'était tourné vers le ciel, lui prêtant une allure fantôme. Il trancha l'air frais de ses sabots polis; ses crins, eux, s'étaient dressés sur son encolure telle une crête. Il n'avait plus l'air d'un simple équidé; non, il était devenu créature démoniaque...
Et alors qu'il se laissait retomber en un mouvement violent, il lança sa tête en avant, avançant cette pelote blanche vers la tête grisâtre du poulain. Ses mâchoires attendaient d'happer quelque chose quand...

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Telle une flèche d'argent lancé à pleine vitesse, une jument passa au grand galop entre l'étalon et le poulain, des dents alertes cherchèrent le museau de l'attaquant, non pas pour frapper mais juste pour le faire reculer en menaçant la peau sensible de ses naseaux. Puis l'animal revint au galop, altier, et se cabra en faisant reculer Shiki d'un regard acéré.

Le poulain sentit son coeur accélérer, ses yeux se mirent à briller et il se dressa sur ses sabots, lui qui jusqu'ici avait plutôt tenté de se faire oublier et de fuir discrètement. L'inconnue avait, sans un mot, dédié au petit un regard vif et Shiki, comprenant l'injonction, recula de quelques pas, si bien qu'il se trouva derrière la jument. Leur ressemblance était cependant frappante...si la robe de Shiki était gris fumée et celle de la jument gris argent, si les crins corbeau du poulain s'opposaient à ceux anthracite de la femelle, leurs pommelures, délicates ciselures sur les flancs, étaient semblables. De même, leur grâce et leurs genoux noueux, le doux modelé de leurs naseaux et leurs yeux partageaient tant qu'on aurait pu les dire identiques. Shiki scintillait sous la lune, sombre silhouette nimbée d'argent et la femelle faisait de même, mais sa robe plus claire étincelait de mille feux comme si une lame venait de s'aventurer sous la clarté lunaire. Une lame, un objet de métal froid, poli, luisant, efficace, tranchant...et mortellement dangereux.
Shiki aurait pu crier, hurler, gémir, un simple mot émerveillé s'échappa de ses lèvres.

"Maman!"

Comment avait-il pu douter? Sa mère, Odyssée, se serait fait couper en tranches pour son fils. Comment avait-il pu craindre qu'elle ne soit pas là à temps, croire qu'elle ne l'avait pas à l'oeil? Penser qu'elle n'était pas toujours là, sa présence rassurante comme penchée sur son épaule, elle ou son animal lié, le pygargue géant Ska?
Sa mère était là...l'issue de la rencontre se faisait plus incertaine.

D'une taille moyenne, les jambes solides mais fines, Odyssée avait l'allure de pur-sang de sa mère Liberty et le tempérament farouche de son père, Sword. Fille du Clan des Etoiles, elle avait pourtant choisi la vie de solitaire et la compagnie de son oncle Black pour chemin, et s'en trouvait bien. Alors qu'elle était jeune et perdue encore, Stelmaria, la Jument Rouge, avait pris sous son aile cette jeune femelle quelque peu pataude, et peu à peu, avec la patience et la rigueur d'un maître, lui avait enseigné les rudiments puis les finesses et les subtilités de cette danse complexe qu'on nomme combat. Désormais âgée de six ans, l'élève était en passe d'égaler le maître et s'il lui manquait encore l'expérience nécessaire à devenir une des plus grandes combattantes que ces terres aient connu, elle était cependant difficile à battre. Avec Aglow Star, le propre fils de Stelmaria et son compagnon de coeur, elle incarnait la prochaine génération de grands combattantes.
Ses crins, longs d'une paume à peine, sa longue queue soyeuse se balançaient au gré du vent de la nuit dans lequel frémissaient ses naseaux. Immobile et droite sur des jambes alertes et prêtes à bondir, elle avait la mine altière et le port de tête royal de son oncle Black, bien qu'elle ne partageât pas de sang commun avec lui puisque Liberty était adoptée. Mais le feu de son regard d'acier, l'air ardent de sa face aux traits harmonieux et délicats, l'imperceptible frémissement le long de ses muscles et de sa peau, tout en elle traduisait son statut de combattante et sa force. Ne sous-estimez pas une jument, même si elle semble frêle...un entraînement acharné avait développé chez la femelle vitesse, agilité et puissance, et une science du combat qu'elle combinait avec le plaisir de la bataille. C'était une prédatrice parmi les chevaux, une flèche mortelle d'argent.
Et c'était le Shikaku qu'elle menaçait.
Secouant sa tête fine, sans perdre des yeux l'adversaire potentiel, prête à en découdre, elle lança d'un ton froid où perçait l'ironie:

"Bonsoir. Puis-je savoir quels sont le nom et le Clan ou la tribu de celui qui vient de tenter de tuer mon fils?"

C'était à dessein qu'elle révélait sa parenté avec Shiki, pour que l'étalon face à elle comprenne qu'elle se battrait jusqu'à la mort pour que le petit vive et que lui, l'étalon noir, meure. Farouche guerrière face aux adversaires elle devenait, quand les siens étaient menacés, une tueuse enragée et prête à tout pourvu que l'autre en face d'elle souffre et meure.

45 lignes = +3 points XP ajoutés

Ce fût comme un fantôme, ou plutôt, comme une bise hivernale qui arriva soudainement pour s'intercaler entre lui; Shikaku devenu fou; et lui, frêle et jeune poulain qui voulait vivre, profiter de sa jeunesse.
Fatalement ou ironiquement, il stoppa son élan, revenant à cet état d'immobilité angoissante, pesante.
Les yeux ardents du grand mâle suivirent le mouvement de la jument. Il n'en tira rien.

Il promena ensuite son regard sur les deux corps gris. Il prit le temps de les analyser, de remarquer ces éléments qui les rendaient un, qui les rendaient eux. Il sut alors qu'elle était la mère, et heureusement que cette 'maman' était arrivée, car sinon, qui sait ce qu'il serait advenu du poulain? Cette tention palpable plaisait particulièrement à l'étalon noir. Oui, elle était prête à en découdre, et celà rendait la suite des évènements incertaine...
Six ans, tout comme lui. Oui, six ans d'entraînement, de combat, de boucherie... Mais la facilté que Black Hole avait de survoler ses six années était déconcertante. De sa vie ou de sa mort, il n'en tirerai rien, pourvu que ça soit beau...
Un sourire de contentement passa sur ses lèvres. Et dans son esprit fou, un schéma, il faisait ressortir ce lien si fragile mais en même temps puissant qui rejoignait les deux êtres. Allait-il être le ciseau qui coupe le fil? Il le verrait bien assez tôt.
Mais les raisons de cette mère, n'étaient-elles pas plus belles que celles de l'entier? Pour n'importe qui, si. Mais pas pour lui. Il voulait se battre pour satisfaire une vieille amie qui pouvait se confondre sous des traits passionnelles mais interdits -maîtresse?-; il le voulait également pour pimenter le jeu, la faire culpabiliser.

Il avait redressé sa puissante encolure, défiant la Solitaire du regard. Le moindre de ses muscles nerveux étaient contractés, ses sens aiguisés. Qui lui avait appris à lui? Qui lui avait enseigné la science délicate du combat? Qui, si ceux n'étaient eux? Personne ne connaissait son passé, pas même lui. Juste quelques souvenirs confus, un endroit, vaste et plane, et sur le sol terreux, un brouillard permanent, happant le premier qui avait la malchance de tomber. Oui, il avait alors vécu comme un voilier, voguant de façon incertaine sur une mère inconnue, se fracassant contre des vagues de trop grandes envergures. Mais une fois tombé, il était impossible de se relever. Quand on tombait, on coulait. Lui avait réussi pendant six ans à garder la tête hors de l'eau, à ne jamais s'arrêter, même les voiles déchirées, saccagées, arrachées.
Sculpté dans le plus noir des bois, il était 'l'étalon d'ébène'. Mais pourquoi n'était-il jamais tombé? Parce qu'on lui avait appris à d'abord faire tomber l'autre.
"Votre fils le sait, qu'il vous renseigne donc sur celui qui a attenté à sa vie."
Il répliqua sur la même voix qu'il avait utilisé face au poulain: suave, chaude, séductrice, enjoleuse; mais prédatrice. Ctte voix qui, une énième fois, ce perdit en un murmure cristallin jusqu'aux oreilles de la Solitaire.

Mourir? Peut-être. La balle était au milieu, mais Black Hole ne reculerait pas. Elle voulait que son fils vive et que lui meure. Lui voulait jouer à ce jeu dont seuls les Shikaku connaissent les règles.
Il se cabra, tranchant l'air frais de ses antérieurs, sur son encolure, sa crinière s'était dressée, fins poignards d'onyx.

♫My Life
You electrify my life♪

Ma vie? Je te la dédis, et ma Mort, elle t'appartient déjà. Embrasse moi de ta bouche sombre, depuis le début je n'appartiens qu'à toi. Tu hantes déjà ce que je suis. Mais j'aime cette appartenance, tu devrais savoir, oui, tu devrais savoir depuis le temps que je t'aime...

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Réagissant aux paroles de Black Hole, Odyssée interrogea son fils du regard, sans perdre un instant sa vigilance vis à vis de Black Hole: elle n'éprouvait nulle confiance envers cet étalon qu'elle venait de voir prêt à exterminer son fils. La jument argentée se cabra et attendit que son poulain prenne la parole.
Ce qu'il fit, soulagé de voir que sa mère était là pour le défendre, comme elle l'était toujours, d'ailleurs.

"Il s'appelle Black Hole et c'est un Shikaku, maman..."

Odyssée riva ses yeux gris sur l'étalon inconnu au regard de jais. Il ressemblait un peu à Black de par sa robe, bien que son aspect physique différât: Black était très grand, un étalon aux allures de pur-sang, mais plus solide et fort que ces animaux là. Sans égaler la masse musculaire de son frère, il était assez solide quoique tout en nerfs, sans une once de graisse. Comme Black cet étalon avait une musculature noueuse, mais il était plus massif que l'étalon noir, sa tête, élégante, moins sèche, moins sauvage quoique toute autant aristocratique. La jument jaugea du regard son probable futur adversaire, sa façon de se tenir, sa façon d'être et de faire...Black Hole avait l'aspect d'un cheval qui a passé une bonne partie de sa vie, sinon toute son existence, à combattre. Odyssée était encore loin de posséder cette expérience qui fait les combattants de légende, comme l'était son oncle. Pourtant elle abaissa les oreilles, la voix railleuse:

"Fort bien. Black Hole, qui que vous soyez, je vous suggère fortement de changer d'idée...car si esquissez le moindre geste vers mon fils, ou vers moi, dans le but de tuer l'un de nous, soyez certains que n'en ressortirez pas intact."

Un dernier avertissement.
Avant la bataille.

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Les yeux sombres de Black Hole semblaient refléter l'enfer, une flamme dardant sur le duo gris. Il fixa la scène, captant l'interrogation muette de la mère, la réponse précise du poulain. Il n'avait jamais su ce que ce lien produisait; bien sûr, il l'avait sûrement connu, mais tout ces moments de bonheurs, il les avait évincé de sa mémoire, comme un souvenir honteux, une défaite.
Pourquoi ne pouvait-il pas y a voir d'amour dans cet être à l'allure sombre? Et cette jument, ne l'avait-il jamais aimé? Et peu à peu, l'image de cette dernière disparaissait, ne restait que sa courbe gracieuse, celle qui ferait ressurgir son identité quand ils se retrouveront. Tous les souvenirs qu'ils avaient ensemble, ils commençaient à s'effacer. C'était hier, mais demain, ce ne serait qu'avant-hier.
Black Hole était un de ces êtres Fous, être qui passe son temps à détruire ce qu'il construit, qui balaye ce qu'il sème, qui tue ce qu'il aime.
Vous expliquer pourquoi serait trop long, vous dire comment, trop compliquer.
Mais de lui, il ne fallait retenir qu'une chose: son indifférence quand à sa vie le rendait guerrier aguéri.
"Ah, Shiki, Shiki... Tu apprends vite... Où plutôt, tu retiens rapidement."
Il gardait sa tête longue droite. Dressant un profil arrogant, prédateur mais enjôleur. Oui, malgré tout l'être de cruauté qu'il était, il avait un charme fou, qui repoussait de la même façon qu'il attirait.
Mais qui était-il? Comment était-ce possible d'être si mauvais? Rien que dans sa façon de faire, on pouvait soupçoner que son but soit que la Terre entière lui en veuille...
"Au fond, qu'ai-je à perdre; sinon ma vie?"
Cette voix de velours qui raillait avec plaisir... Tout en lui était corrompu.

♫I just don't care if it's real♪

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Ce charme...Odyssée le connaissait bien. C'était là le même genre d'aura que celle de Black ou même de son amant, Aglow Star. Le même genre d'aura que celle d'Equinox. Trois chevaux de légende ou en passe de le devenir, trois combattants. Athlètes vifs et nerveux, prédateurs parmi les proies, drapés dans leur robe noire comme les ailes d'un corbeau, ces chevaux dégageaient une aura de danger et de mort...si attirante. Pourquoi la mort et le danger attirent-ils toujours tant les chevaux?
La même aura émanait cependant d'Odyssée, on devinait sous sa douce élégance le corps entraîné d'une guerrière, dans ses yeux la concentration glacée des combattantes. Elle aussi dégageait cette étrange aura qui ajoutait au charme de sa beauté physique. Un corps en pleine santé, athlétique, un regard captivant et attentif, un air comme détaché du monde et surtout, la confiance en soi que donnent les victoires et la maîtrise de son corps faisaient des guerriers des êtres au grand charme. Odyssée arqua le col et répondit aux derniers mots du cheval noir:

"Effectivement. Moi non plus je n'ai pas grand-chose à perdre..."

Elle se figea et redressa la tête, enjôleuse, et froide à la fois, un charme glacial qui avait fait battre plusieurs coeurs, outre celui d'Aglow Star. Elle avait choisi l'étalon noir mais avait été courtisée par bien d'autres, alors même qu'elle n'avait déjà d'yeux que pour le fils de Stelmaria. Cela avait été un coup de foudre véritable, deux âmes soeur se reconnaissant en deux êtres, sans qu'un mot soit échangé, à peine un regard. Elle s'en souvenait bien...cette proximité immédiate, leurs jeux, virant de combat à danse, mêlant combat et danse, et puis un beau matin, Shiki...
Elle se battrait. Elle refusait de perdre ce bonheur et cette joie là et elle se battrait, non pour sa vie, mais pour le plaisir du combat et pour tout ce qui l'enchantait sur cette terre. Tant de choses...mais bien peu à perdre.
Odyssée arqua le col. Elle avait une grâce certaine et une grande élégance, une façon de se mouvoir qui avaient rendu fous certains étalons, fous d'amour ou juste de désir. Mais la belle savait alors se défendre et nombreux, parmi les chevaux qui avaient cru pouvoir abuser d'elle, étaient ceux dont la chair servait d'engrais ou dont l'honneur gisait encore sur le sol d'un combat.
Sa voix s'éleva encore, dernier avertissement, poli et aimable:

" A vous de voir désormais...ou nous nous saluons et en restons là, ou vous insistez et nous verrons bien qui l'emportera...j'aime le combat, et je ne reculerai pas devant lui."

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L'étalon noir était indifférent à ce charme envoûtant qui embaumait son être; cependant, il remarqua que la guerrière d'argent possédait cette même aura qu'il avait quelques fois croisée. Ce charme de glace, brûlant à la fois par sa puissance, il y cédait. Non que les cendres de son coeur aimant se remettent à battre, simplement que face à un vrai guerrier, il ne reculait jamais. Pour la simple raison qu'il effectuait ainsi la seule chose qu'on ne lui ai jamais apprise: avancer pour ne pas reculer, faire tomber pour ne pas tomber. Que lui avaient-ils appris d'autre sinon? Peut-être qu'il n'existe pas d'adour plus beau que celui de la Mort. Mais quoi qu'ils aient pu lui dire; le résultat était là: Black Hole.
Le plus effrayant dans toute cette histoire, c'était qu'il savait qui il était, il savait que tout le monde le détestait pour ce qu'il incarnait, et pourtant, il ne faisait rien pour changer.
Du regard des autres, il ne s'en était jamais soucié. A quoi subir les railleries d'êtres qui se refusent à comprendre? En lui, l'envie de vivre n'existait pas, l'envie d'être légende non plus. Ce qu'il voulait alors? C'était voir souffrir les autres. Pourquoi? Non, il ne s'agissait pas là d'une vengeance... Quoique?
Chaque guerrier avait son propre jeu, le sien était de peindre la Mort sur le visage des autres. Etait-ce son environnement lugubre d'entant qui lui manquait? Où tout simplement, était-ce cette brûlante envie d'en découdre, soit de passer, soit de tomber, mais de ne pas demeurer dans l'état neutre de la chose. Ce devait être celà: il voulait faire ce qu'il avait à faire, puis partir.
Tomber sous un plus fort que lui alors qu'il aurait tout donner, terrasser un plus faible qui aurait tout donner. Il ne pouvait soit que gagner, soit perdre: soit tuer, soit être tuer.
"Ne crois pas ça... Tu as tellement à perdre. Pense à ce petit Shiki. Pense au père de cet enfant chéri..."
Son ton était paisible, velouté, chaud, onctueux et... Attentionné? Quand il prononça le nom du poulain gris fumé, il fit un signe de tête vers luui, non agressif, bien au contraire.
Apprécier ce qu'on vient d'essayer de détruire? Et si ce cercle vicieux représentait l'animal?
Comment savoir?

Si Black Hole était aujourd'hui là, à l'Aube de sa sixième année, c'est qu'il avait combattu, et gagné. On ne lui avait jamais laissé le choix, on lui avait imposer cette victoire. On lui avait dit de survivre, et il s'était battu. Au début, ce n'était pas pour la danse, mais pour gagner, pour avancer jusqu'au combat suivant; mais plus il avait grandit, plus ce besoin de victoire s'était transformé en amour de la danse complexe.
Et aujourd'hui, il ne se battait plus que pour l'amour du combat, gagner où perdre lui était devenu égal. Il voulait connaître, savoir, apprendre.
"J'aimerai que le jour de ma Mort, je sache que j'ai vraiment vécu."
Il recula de trois foulées, élevant une énième fois sa masse sombre dans l'air nocturne, ses sabots battant encore une fois l'azur, ses crins dessinant une crête abrupte.
"J'aime aussi cette science, et si je refusais de goûter à vos coups, je pense que je le regretterai quand la Mort m'emportera."
C'était une invitation, où plutôt, une supplication. Oui, il voulait souffrir des coups de la jument, il voulait voir ce que cette guerrière valait.

♪And you can't resist
And you can't resist
Making me feel♫

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Odyssée pointa les oreilles vers Black Hole. Penser à Shiki? Il croyait qu'elle n'y pensait pas? Qu'elle se moquait bien que son fils grandisse sans mère? Non...Odyssée, pourtant amoureuse du combat et de la liberté, avait trouvé d'autres amours en les personnes de Shiki et d'Aglow Star. Jamais elle ne renoncerait à ce bonheur si neuf et pourtant...il fallait bien avouer qu'elle ne craignait pas la mort. Odyssée se battait, contre un adversaire chaque fois nouveau, mais toujours derrière chaque coup planait le même spectre, la Mort, avec son sourire noir et son souffle rauque...elle la connaissait, elle avait souvent dansé avec elle, cette Camarde, comme disait Cyrano, cette bête d'ombre...la jument argentée ne craignait plus la fin naturelle de toute vie. Tous mouraient un jour, Black, Stelmaria...tous ces grands combattants mèneraient un beau matin leur dernière danse et, au soir de leur vie, s'effondreraient dans l'herbe qui si souvent avait accueilli leurs adversaires, yeux mi-clos et regard tourné vers le ciel, peut-être du sang sous eux...Comme eux, Odyssée voulait vivre, vraiment, pleinement, à fond, vivre peu mais vivre réellement, sans demi-mesures. Comme eux elle voulait pouvoir dire, au seuil de la mort, qu'elle avait vraiment vécu...ne pas découvrir qu'elle n'avait fait que vivoter, avançant péniblement dans une existence pâle, lassante, sans intérêt. Non, vivre, vivre et aimer, aimer et combattre, aimer combattre, et mourir dans une apothéose!!

Et je voudrais mourir, un soir, sous un ciel rose,
En faisant un bon mot, pour une belle cause !
-Oh ! frappé par la seule arme noble qui soit,
Et par un ennemi qu'on sait digne de soi,
Sur un gazon de gloire et loin d'un lit de fièvres,
Tomber la pointe au coeur en même temps qu'aux lèvres !

Cyrano de Bergerac

Odyssée se cabra à demi, fixant Black Hole dans les yeux:

"Moi de même. Vivre vieux et vivre à demi, vivoter, avancer sur un chemin morne, quel intérêt? Je ne veux pas découvrir que je n'ai pas vécu au seuil de la mort!!"

Elle recula d'un pas, jeta un regard à son futur adversaire et se tourna vers Shiki:

"Recule et n'interviens pas. Ce n'est pas ton combat, fils."

Lui effleurant les naseaux d'un geste vif, elle se dressa face à Black Hole, petit, mais forte et musclée, se cabra droit sous le ciel étoilé, ses sabots battant l'air, élevant sa masse sous la voûte piquetée de diamants, sa crinière se dressant sur son encolure. Ses yeux flamboyaient, mais elle était glacée de concentration. Un feu de glace qui dansait dans ses veines, avec l'adrénaline et l'anticipation du plaisir du combat...
Battons nous, frappons, blessons-nous! J'ai soif de l'ivresse du combat et de celle du sang, soif d'une belle danse, soif d'une chorégraphie de mort! Combattons!

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Autour d'eux, tout s'était tu. Peut-être illusion, mais aux oreilles de Black Hole, aucun son, autre que le battement régulier de son coeur, ne parvenait. Et comme s'il s'apprêtait à vivre les dernières secondes de sa vie, il suivit des yeux le mouvement de la jument. Ces paisibles secondes semblèrent durer une éternité pour l'entier sombre.
Sur son visage fermé, un calme lugubre se dessinait, chassant au loin toutes les appréhensions qu'on aurait voulu lui prêter. Il n'était plus le même, il n'était plus Black Hole. Il était devenu l'autre, celui qu'on lui avait appris à être. Aussi froid, tranchant et cruel que la glace, mais brûlant par l'ardeur de la flamme et du combat à venir qui tenaillaient son être.

Les gestes souples et félins du commencement, il les connaissait déjà, s'êtant joué d'eux tellement souvent. Mais ce qu'il attendait, c'était de voir la technique, la science de cette guerrière. Il attendait la souffrance et la douleur, il attendait les coups, les blessures.
Le combat était lancé, et rien ne pourrait arrêter le cour de cette action. Seule l'issue de ce combat demeurait incertaine, car il était sûr que les deux guerriers donneraient tout.
Il s'écarta en un mouvement las de la jument d'argent; créant à contre-coeur une distance. Une bise fraîche vint jouer dans ses crins, il s'élança alors, quittant sa place dans un mouvement élastique, dexter. Plus que des pas, une danse, belle, enjôleuse mais cruelle et meurtrière.
Les premiers coups ne serviraient qu'à jauger l'adversaire, même si, en cette nuit qui s'annonçait longue et incertaine, les deux guerriers allaient frapper dans l'espoir de blesser, et non seulement de toucher.

Il adopta donc une allure féline, lançant ses mâchoires à la recherche d'une quelconque prise sur le corps argenté. Ce premier coup n'était que test, il voulait calculer; appréander l'esquive et la réplique de la guerrière.

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Combat...elle ne ressentait pas d'excitation, mais une intense concentration, tandis que montait en elle l'adrénaline et l'ivresse qui s'ensuivrait...elle la connaissait, la fièvre du combat! Cette vague immense qui culbutait en emportait tout combattant, cette vague gigantesque que tout un chacun connaissait pourvu qu'il ait combattu une fois dans sa vie...quand le sang rouge et épais sourdait des plaies, quand son goût fade faisait frémir ses papilles, quand ses yeux s'enflammaient du désir de vaincre...elle avait appris peu à peu, au fil d'un entraînement rude, à se contrôler, à ne jamais oublier que la rage de vaincre de l'adversaire était au moins égale, sinon supérieure à la sienne. Jamais cet état de fait ne s'effacerait de son esprit, même au plus fort du combat...Elle demeurait elle au coeur de la bataille, éveillée plutôt que transfigurée par l'affrontement.
Tel n'était pas le cas de tous...elle connaissait la malédiction de Stelmaria, qui la poussait à devenir une bête assoiffée de sang. Elle savait que cette malédiction s'était glissée dans le sang d'Aglow Star par son ascendance. L'étalon noir connaissait lui aussi la frénésie intense du combat, lorsque l'on n'est plus soi, et surtout connaissait également des épisodes de rage destructrice au cours desquels il devenait un tueur, auquel tout était égal pourvu que le monde autour de lui s'effondre. Elle avait été témoin d'une de ces crises, elle l'avait connu, elle l'avait calmé par sa seule présence à ce moment là...et ils avaient été capturés par les hommes. La cicatrice d'un lasso, sur l'encolure d'Odyssée, était encore là pour en témoigner...
Elle s'écarta d'un pas dansant de l'étalon tandis que Shiki reculait pour se tenir à l'écart. Puis porta une attaque alors que Black Hole faisait de même...dents découvertes, leurs mâchoires brillèrent sous la lune, prêtes à saisir l'adversaire. Black Hole était trapu et puissant mais aussi adroit, tandis qu'Odyssée, plus légère que lui, virait et esquivait, danseuse de mort.
La première attaque fut un test. Les dents du cheval noir frôlèrent la robe d'argent, et la guerrière les évita d'un pas de côté souple et presque ondulant, entamant la complexe chorégraphie qui se poursuivrait jusqu'à la reddition de l'un ou sa mort, jusqu'à la fin du combat. Evitant l'étalon noir, elle volta aussitôt et lança ses postérieurs, sabots tranchants, en direction de l'avant-main du mâle.
Le combat s'engageait.

21 lignes = 1 point ajouté

Un effleurement fragile, embrassé par une sensation de vide, vite comblée par l'impacte du vent, créé par le mouvement rapide de le tête de l'entier. Et déjà, il reconnaissait les traits d'une danseuse sombre, assassine sous ses airs délicats et doux. Danseuse qui était le reflet métallique de sa robe. Cependant, il dût se détacher de sa pensée, devinant dans la pénombre l'esquisse vive d'un coup à venir. Il eût juste le temps de changer de pied, prenant un autre point d'appui, mais la nécessité de se sauver de ce coup ne le frappa pas; il se laissa donc toucher, s'imposant la violence modérée de l'impacte du sabot qui, aussitôt touché, se détacha de la robe nuit, laissant apparaître un arc de cercle poussiéreux. Il s'ébroua, imposant à ses crins une ondulation tortueuse. Il fit un arc de cercle, une volte, moins gracieuse mais aussi précise que celle de la danseuse. Et à la manière d'un aigle, il fonda sur sa proie, l'encolure légèrement incurvée vers l'intérieur pour protéger sa tête, l'épaule sortie pour cogner, désiquilibrer. Il lança également un antérieur, à la recherche d'un jarret à happer, pércuter.
La danse prenait forme.

Le coup n'avait été qu'une provocation. Ils en étaient encore à prendre la mesure l'un de l'autre, et les frappes ardentes de leurs sabots n'avaient pas encore pour but de blesser. Mais bientôt, le sang ruissellerait sur les robes fumantes, et son goût doux-amer viendrait titiller les langues et les sens des deux chevaux...Bientôt, la mort danserait parmi eux, menace tangible et jamais plus précise qu'au coeur d'un combat...Odyssée sentit l'étalon volter. Il avait la force, elle avait la grâce, mais les deux êtres maîtrisaient leur corps à la perfection, véritables machines à tuer. Seuls, différaient leurs buts...Odyssée voulait protéger son fils, comme une lionne. Black Hole voulait faire couler le sang, il l'avait lui-même avoué...mais se trouver face à un bon combattant ne lui déplaisait pas. Elle le vit revenir vers elle, tête protégée, épaule en avant, antérieur prêt à jaillir pour heurter un bout de jarret, ces jambes noueuses et longues qui sont le point vulnérables des chevaux...Odyssée virevolta, lui déniant le droit de lui frapper la jambe. Ses postérieurs chassèrent tandis qu'elle voltait et bondissait à son tour vers le mâle, antérieur tendu vers un de ses genoux. Pas les dents...il eût été dangereux de hasarder sa tête si proche des sabots.

Les yeux écarquillés, Shiki observait. Jamais encore il n'avait pu assister à un véritable combat.

Complexe pas de deux où venait planer la présence de la Mort. Rassurante présence de cette macabre puissance, démoniaque et cruelle... Qu'il pouvait l'aimer! Cette alchimie entre pulsion et science, il la savourait! Le Shikaku aimait tout dans les combats! De la précision du geste jusqu'à l'issue incertaine... Tout.
Sur ce coup là, il avait cherché un membre fragile de la jument, mais la danseuse d'acier était bien trop souple pour se faire avoir si facilement! Alors qu'une nouvelle offensive se préparait, il vit la jument revenir, encore. Elle visait son genou; endroit stratégique, chaos pour Black Hole s'il était touché.
Pris dans son élan, freiner ne pourrait être que voué à l'échec. Il opta donc pour un étrange mouvement: il lança son avant-main sur le côté, de sorte qu'elle soit parallèle au corps d'argent, tandis que ses cuisses et ses postérieurs suivaient le mouvement, mais de façon moins dynamique. Il restait donc à Odyssée l'opportunité de mordre la croupe du mâle ou de tenter tout autre chose, mais elle n'aurait pas son genou. Quand à lui, il lança ses mâchoires vers le flanc de la jument.

Pulsion, désir, science...c'était la pulsion qui mettait l'organisme en mouvement dans le but de faire couler le sang, de se battre, de sentir ce sang...le désir de faire couler le sang, en d'autres mots. La science du combat au service de ce désir...oui, c'était en réalité bel et bien une volonté, plus encore qu'un désir. Les deux chevaux désiraient le combat et, mettant en oeuvre les moyens nécessaires pour assouvir ce désir, se mettaient à vouloir ce combat.
Odyssée vit la manoeuvre du mâle: des années d'entraînement auprès de Stelmaria l'avaient habituée à lire les corps, les gestes et les mouvements. Black Hole ne pouvait se protéger entièrement, son arrière-main, son corps demeuraient exposés, mais il protégeait ses fragiles et noueuses articulations. Odyssée aurait frappé au flanc si elle l'avait pu, mais les dents du Shikaku filaient vers son propre flanc lustré. Couchant les oreilles, Odyssée arrima ses antérieurs au sol et volta sur les épaules, se trouvant perpendiculaire au cheval. Trop tard désormais pour saisir son dos...il lui restait la croupe, la hanche, et ses mâchoires heurtèrent violemment, puissantes tant par la force du choc que par les dents tranchantes, la pointe de l'illium de l'étalon.

Une vive douleur le pénétra. Plus qu'une brûlure, il lui semblait que la guerrière avait découvert sa chaire, lui arrachant la peau. Bien sûr, la morsure de cette dernière n'avait pas occasionné une telle plaie, mais elle avait découvert un long filet rouge et, bientôt, le liquide chaud et vital s'écoulait sur le flanc polis de l'entier.
Le sang appel le sang.
Odyssée était habile, rapide, farouche. Odyssée était guerrière et ne faisait pas dans la demi-mesure. Ils avaient voulu les coups pour les coups, ils l'avaient.
Et derechef, il tenta l'attaque: alors qu'elle se trouvait encore cramponnée à lui, il plaqua sa masse sombre contre son corps, de sorte à être parallèle à elle, et chercha la croupe d'argent de ses dents tranchantes; tandis qu'il donnait un énergique coup de reins destiné à se débarrasser des dents de son adversaire.

Odyssée sentit la hanche de l'étalon s'arracher à ses dents et elle resserra un instant ses mâchoires afin d'achever en beauté, d'emporter cette peau dans laquelle elle venait de mordre comme dans une pitance tant espérée. Puis la jument argentée, sentant le danger, esquissa un pas de côté, pivota autour de ses épaules. Naturellement, elle ne put éviter les dents de l'étalon, qui déchirèrent sa croupe fine et musclée, mais elle échappa à un coup trop profond: les plaies étaient encore superficielles. C'était le sang qu'ils voulaient tous deux, plus encore que la victoire ou que la mort.
Odyssée, inversant sa rotation, lança ses postérieurs dans la figure de l'étalon, cherchant à atteindre une mâchoire tendue avant qu'elle ne se retire. Ce serait bien sûr le mieux, mais ses sabots pouvaient aussi écorcher une joue...